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26 janvier 2022, 10 h 24 mi
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MondeAnticipes insta


16 janvier 2022, 11 h 08 mi
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Anticipation psychogéographique de la société qui vient
17 septembre 2021, 17 h 51 mi
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Éloge du diavertissement

Avant d’entrer dans le vif du sujet.

Naviguer dans les eaux tumultueuses de notre époque épique est un parcours éprouvant. Dans les temps viennent, je vous dis pas ! Les eaux monteront. Les plaines disparaîtront.  Le ciel nous tombera sur la tête. Le feu nucléaire nous rôtira. Les covids barbares nous étoufferont…

Ou pas.

Ces représentations d’un futur impitoyable évoquent volontiers les dragons des contes et légendes[1] de la tradition occidentale : le symbole du mal, de la Bête de l’Apocalypse. Ce sont avant tout des créatures liées à la terre et au feu, symbole de la puissance des forces naturelles. Ils rejoignent par ces caractéristiques les anciennes créatures chthoniennes à l’allure de serpent des mythologies indo-européennes : Apollon combattait Python, Krishna rivalisait avec Kaliya, Rê luttait contre Apophis…

De nouveaux dragons surplombent nos imaginaires et font recette. Ce sont les formes nouvelles du courroux des Dieux. Colères légitimes. Faits plus réels cette fois sans doute, mais tout autant menaçants.

Les angoisses de chaque culture, de chaque période de l’histoire sont des défis à la psyché de leurs contemporains – des dragons qui font peur aux enfants et excitent les excités

La terre est mise à mal. Neptune fait sa colère océanique. Zeus envoie le feu. Les enfants se terrent sous les draps. Les excités évoquent la fin du monde. Les sachants alertent et ne sont guère écouter. Pourtant les Grecs ont désolé Troie.

Je ne sais pas s’il faut prendre les Dieux au sérieux et les dragons au pied de la lettre mais vue la place qu’ils prennent ça mérite d’en causer un peu.

Complément à l’intro par une pirouette encourageante.

En causer, c’est ce que fait Cynthia Fleury par un beau matin d’été sur R.F.I. en citant Rainer Maria Rilke :

« Comment oublier ces mythes antiques que l’on trouve au début de l’histoire de tous les peuples ; les mythes de ces dragons qui, à la minute suprême, se changent en princesses ? Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses qui attendent de nous voir beaux et courageux (…) vous savez bien que vous êtes au milieu de transitions, et que vous ne souhaitiez rien tant que de vous transformer.»

Cynthia Fleury a le chic pour remettre les choses à leur place et éclairer de son autorité bienveillante la dialectique dragons/princesses : les dragons de la colère – à moins d’un sortilège de dernière minute – ne semblent pas près de retenir leurs coups. Pourtant notre philosophe psychanalyste préférée semble suggérer que les carottes ne sont pas cuites. C’est cet espoir ténu qui inspire ce qui va suivre après une nouvelle digression…

Dernier ajout, donc, qui n’est pas la digression qu’on croit

car elle ramène le lecteur à sa réalité de spectateur qu’on va diavertir.

Le diavertissement est l’industrie de demain. La logique de ce néologisme ne vous échappera pas. Le champ qu’il recouvre – mix de divertissement et d’avertissement – est dans l’air du temps depuis un certain temps.

L’industrie du divertissement est spectaculaire, polysensorielle, immersive et volontiers apaisante. Gros business. Hollywood, Bollywood, Nollywood. On la soupçonne d’avoir pour ambition de mettre le charme tragique de la condition humaine au second plan pour faire un triomphe permanent à la récréation consolatrice.

L’industrie de l’avertissement est, elle, fougueuse et se veut aiguisée : l’anticipation, la prospective, la futurologie, la Science-fiction chacune à sa manière se mettent sur les rangs. Pas encore très gros business mais growing. Pas moins spectaculaire, pas moins polémique et tout autant polysensorielle, immersive mais plutôt politique et tentée par la mise en scène et le triomphe du tragique. Les Utopiales à Nantes, Les intergalactiques à Lyon, Les Hypermondes à Bordeaux, BlueCon – Convention nationale de science-fiction à Valbonne , les Hypermondes à Bordeaux – liste non exhaustive. Les Mondes Anticipés sont de la partie.

Le divertissement est peut-être une prière – un peu de l’ordre de l’abandon de soi, du don du soi à une entité surplombante, qui peut être parfois bienveillante, parfois étouffante. Les divertis y trouvent leur compensation. Au cœur du divertissement on soupçonne qu’il s’agit de faire diversion. Suivez mon regard. Sans exclusive ni persiflage.

Je n’insinue pas que l’homme diverti en se confiant à une puissance étrangère (divine, idéologique, financière, humoristique, musicale…) n’est pas en état d’affronter l’avenir. S’il est souvent « opiumisé », hypnotisé, décérébralisé, ce n’est pas toujours le cas. Ce type d’accusation a été tentée mais ça ne marche pas comme ça. Le fait religieux est peut-être un divertissement au même titre qu’un spectacle d’humour ou qu’un concert rock cela n’enlève rien à son efficacité.

Pascal et Debord avancent que le divertissement est un danger existentiel –  en invoquant les sept péchés capitaux pour le premier, la société de consommation pour le second. On a parfois envie de les envoyer se faire voir. On sait bien que le divertissement est une façon de dissoudre – sinon de résoudre – le tragique de l’existence.

L’avertissement est un calcul – une matière calculée[2] qui suggère que l’homme se prend (ou se reprend) en main. On laisse tomber l’idée d’un grand horloger barbu ou d’un dieu spaghetti au profit d’une équation qui énonce qu’on a intérêt à bien calculer l’itinéraire des temps qui viennent. L’avertissement est souvent amer, inquiet, voire terrifié et terrifiant.

L’homme averti en vaut deux, peut-être, mais être à deux n’est pas toujours suffisant pour se rassurer. D’autant qu’avertir est une prise de risque personnel. Avertir est souvent altruiste. On avertit pour le bien des autres. Ce n’est pas toujours récompensé. Il arrive que les lanceurs d’alerte agacent les braves gens.

Remember Laocoon qui a voulu prévenir les Troyens du piège équestre bien connu tendu par Ulysse.

M’est avis que ni le divertissement ni l’avertissement ne sont blâmables. Après tout ce sont des instruments de navigation utilisés depuis la nuit des temps. Parler de diavertissement c’est reconnaitre sans chichis que tout avertissement doit être spectaculaire pour avoir la moindre chance d’être entendu et qu’aucun divertissement n’est neutre ni innocent.

Diavertir fera donc l’affaire pour notre affaire qui est de jeter un œil sur la société qui vient et dont on présente ici un épisode spectaculaire.

Car nous en venons au vif du sujet : les dangers qui menacent l’évolution tellurique de la planète sont à l’image de son évolution psychosociologique – hypothèse qui permet de formuler l’hypothèse psychogéographique que voici :

De même que le dérèglement climatique s’incarnait déjà par petites touches violentes mais localisées, de même des signaux faibles indiquaient depuis un moment une radicalisation des postures et des pratiques d’existence. Une géographie du futur pourrait se présenter comme ça :

Le GIEC l’a confirmé : l’eau monte. Il va falloir trouver refuge. Les terres immergées seront occupées par des tribus déterminées, bien établies dans leurs convictions, solidement installées sur leurs terres d’élection. Ne serait-ce que parce que pour survivre il faut s’accrocher[3].

Inutile de chercher à les déloger. Au pire vous pourrez essayer de négocier un appontement pour un ravitaillement d’urgence mais ce ne sera pas sans danger. Plus aucun territoire sur le globe ne sera neutre. Pas un port qui n’aura ses convictions affichées et qui n’exigera allégeance. Il vous faudra pourtant bien faire escale un jour ou l’autre.

Et on ne pourra pas « préférer ne pas » à la manière du Bartleby de la nouvelle de Melville qui « préférerait ne pas » à chaque demande de son employeur sans en donner aucune raison.  On ne pourra pas « préférer ne pas » ingérer des protéines. Ou alors cela s’appellera une grève de la faim. Ce ne sera pas une option. On ne pourra pas « préférer ne pas » se coltiner au monde réel des îles et des ports. Ce serait abandonner tout contact social, toute forme de ressources. Bonjour l’avenir !

Larguons les amarres avec une proposition de version beta d’une anticipation géographique…

Guide du navigateur psychogéographique

Vous éviterez d’aborder l’aire du Clash pour votre premier ravitaillement.  Vous en prendriez plein la tronche à peine auriez-vous ouvert la bouche. Les séquences de prises de bec, d’injures, insultes et outrages dans les media, dans les forums, sur les places publiques ou privées vous fascineront mais vous laisseront un goût amer. Vous avez un peu de temps devant vous surtout si c’est le premier rivage en vue. Le voyage est loin et les horizons lointains. Rien ne vous oblige à faire escale.  Au début de la troisième décennie de ce siècle le sujet le plus clashant était le vaccin. Ceux qui n’en ont pas voulu ne sont plus là en pour en parler. Passez votre chemin. L’atmosphère y est sulfureuse, à peine respirable.

La zone du Woke n’est guère plus accueillante. On sait que le terme voulait dire « éveillé » et que c’était l’idée qu’il fallait expulser les injustices subies par les minorités et mettre en place un observatoire social pour débusquer les iniquités. L’observatoire est devenu une police politique. Et très vite on vous interdisait d’être ce que vous étiez.  Cette démarche a dérivé vers une « cancel culture » qui interdisait à quiconque ne pense pas comme vous de prendre la parole. La zone du Woke est décourageante. Les feux de l’ostracisme aveugle couvent sous la cendre, méfiez-vous.

Les landes du Care : voilà qui semble un peu mieux. Elles vont réveiller en vous le Bon Samaritain qui sommeille. Il s’agit ici tout autant de l’acte de soin que du sentiment et des valeurs qui l’accompagnent. La pandémie a mis en évidence que la solidarité n’avait pas disparu du paysage, que la proximité et la bienveillance pouvaient apporter un rééquilibrage à la méchanceté foncière de l’humanité. C’était un peu naïf mais toujours bon à prendre. Vous y séjournerez un moment avec profit mais on risque de vous demander d’y rester car on connait votre sens de l’engagement. Je vous laisse y réfléchir deux minutes. C’est vrai que quand on n’a pas tout donné on n’a rien donné mais quand même.

Ah, le Safe , la ZAD du Safeland… parce que le principe de précaution quand même !!! il ne faut pas l’oublier.  Le  «safe» évoque une zone de repli sur un territoire protégé: une ZAD, une « zone d’aménagement doux ». Le grand frisson du monde fatigue et inquiète – la recherche d’un cocon dans une ambiance sereine et ouatée fait rêver beaucoup de monde mais ce territoire ne peut accueillir toute la misère du monde. Les places y sont chères. Vous aurez peut-être droit à un ticket dans la file d’attente mais je ne vous conseille pas de vous attarder. Je cite les bons auteurs[4] : « On ne peut que prouver l’existence de certaines choses, pas leur inexistence. L’acceptation commune du principe de précaution est donc un non-sens absolu, qui dit que quand on ne sait pas tout, mieux vaut ne rien faire ». Vous voilà prévenu. Cela dit, serein et buriné.e navigateur et navigatrice solitaire que vous êtes (par la force des choses ou pas), vous savez tout ça. Il y a longtemps que vous ne prenez plus trop de protection. Donc escale inutile.

Le pays du Yin est la plus belle chose qui puisse vous arriver. Si vous y arrivez. Les Mister Yang – qui n’ont pas compris que leur avenir était bouché  sans un séjour de rattrapage dans l’île – vont passer au large. Tant pis pour eux. En réalité ceux qui passent sans aborder ses rivages ont surtout une trouille bleue. Le pays du Yin c’est le pays des magiciennes et des sorcières, de la Vierge Marie et d’Hécate. Je ne choisis pas ces références féminines pour faire peur et faire fuir les navigateurs barbus. Ce n’est pas non plus un choix littéraire pour faire le beau devant ces dames. Le pays du Yin est l’avenir de l’humanité. Le rocher du reset. Là où va s’opérer la réconciliation et peut être la rédemption de l’humanité. Seulement n’allez pas croire que l’appontage soit des plus simples.

Le lecteur attentif aura remarqué mon usage plutôt safe dans l’escale précédente d’un buriné.e inclusif. C’était un clin d’oeil au Directoire quand les Inc’oyables et les Me’veilleuses affectaient de ne pas prononcer les r. les dames du Yin méritent mieux que des tours de passe orthographiques. Il y a plus important que ces subtilités grammaticales. Au pays du Yin vous allez découvrir sagesse et bienveillance : attention c’est nouveau et ça gratte.

Les Marches sous tension sont des territoires tampon. C’est le propre des religions instituées qui diavertissent sans le savoir.  En prétextant faire tampon entre le monde réel et les domaines de l’invisible elles organisent le politique ici-bas…le politique et le religieux ont partie liée. Je dis ça je dis rien. Juste je dis quand même que sur ce rocher la tension entre les différentes révélations divines crée un climat de concurrence stimulante. Ça tient les esprits au chaud. Ça permet une coexistence à peu près supportable les jours avec et les jours sans on s’entretue.

La Vallée du Myste en rajoute sur l’escale précédente. Cette terre immergée n’en est pas loin. On s’observe des hauteurs et la vallée est  souvent peuplée par des transfuges des Marches.  Les mystères antiques sont rejoués tous les jours par cette population sous influence. Cette influence-là est beaucoup plus radicale que dans les Marches. Ça vaut la visite. Vous êtes ici dans la vallée des sectes qui aspirent à retourner dans les Marches pour y prendre le pouvoir. Histoire de rajouter de la tension sans doute. Vous pourriez à la rigueur vous y arrêter pour contempler l’ébullition de la matière illuminée qui aspire à une reconnaissance universelle. Vous n’allez pas être déçu.  C’est la fête à la surenchère des illuminations.

Et voilà qu’à son tour la Route du slow fascine.

Le slow dans cette île est une longue route tranquille. D’où son nom. Le mouvement Slow était un recyclage de l’idée qu’on va trop vite et que la vitesse comme le disait Paul Virilio est une perversion. Le neuroscientifique Lamberto Maffei avait démontré que notre cerveau n’est pas adapté à la précipitation. Il invitait à redécouvrir les potentialités et les avantages d’une civilisation pratiquant la réflexion, basée notamment sur le langage et sur l’écriture, et à redonner la priorité au temps du cerveau plutôt qu’à celui des machines. Je conçois que vous soyez tenté de vous y poser.

Les sentiers de la tech

Inévitable mais compliqué. Ce rocher est en mouvement permanent. Il disparait et se renouvelle du tout au tout le temps d’un virement de bord. C’est le domaine de la matière calculée

Ce voyage virtuel est donc un diavertissement comme le lecteur solitaire l’a bien compris.

Reste à savoir de quoi sera fait l’horizon qui nous attend dans le monde qui vient. Jusqu’ici l’itinéraire on ne peut pas dire que nous ayons été tenté par une escale plus qu’une autre.

Mais ceci est une autre histoire…  

 

Christian Gatard 

Sociologue, prospectiviste et entrepreneur dans le domaine des sciences humaines, il est le fondateur et animateur de CHRISTIANGATARD&CO, institut d’études internationales de marchés et directeur associé du COMPTOIR PROSPECTIVISTE, bureau de prospective, et du magazine FUTURHEBDO.fr. Il est également essayiste et romancier.

Bibliographie

Mythologies du Futur, essai, L’Archipel, 2014 ; Nos 20 Prochaines Années, le futur décrypté́, essai, L’Archipel, 2009 ; Bureau d’Études, Récit de société́, Les Impressions Nouvelles, 2008 ; Le Peuple des têtes coupées, enquête sur les mascarons, essai, Coprah, 2005 ; En respectant le chemin des Dragons, roman, L’Harmattan, 2003 ; De Conchita Watson, le ciel était sans nouvelles, roman, L’Harmattan, 2000 ; L’île du Serpent-coq, roman, L’Harmattan, 1999

Livres collectifs

L’Horrificq Disputation, Éditions du Comptoir Prospectiviste , 2021 ; Poste Restante, de Tami Notsami, KAjart Éditions, 2019 ; Mythanalyse de l’insularité, M@gm@ , Sicile, 2019 ; Archéologie d’un futur sicilien, Thrinakia, Catania 2017 ; Rupture vous avez disrupture (2015) et Chroniques de l’Intimité connectée (2016) , Éditions Kawa ; Les Clés de la Mutation, Chroniques Sociales, 2012 ; Manuel du Social Media Marketing, comprendre les réseaux sociaux, Éditions Groupe Select, 2012 ; Dictionnaire de la Mort, Hachette 2010 ; Odon, sourcier, sorcier, magicien, Gourguff Gradenico, 2008


[1] https://www.gardiensdelaterre.org/index.php/fr/site_content/85-magie-chamanisme/83-les-dragons-mythologie-symbolisme

[2] Expression piquée à Etienne Klein un matin sur une radio

[3] Comme les moules dont la formidable capacité d’adhésion provient d’une sécrétion de protéines d’une efficience à toute épreuve pour la survie de l’espèce.

[4] https://blogs.mediapart.fr/yann-kindo/blog/240111/contre-le-principe-de-precaution



Mode d’emploi pour une mobilité immobile
4 avril 2021, 14 h 07 mi
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Mode d’emploi pour une mobilité immobile


On ne va pas se laisser avoir par les Cassandre et autres Tirésias (le devin d’Œdipe) qui se délectent de futurs délétères et dystopiques à tire-larigot.

On sait que le Larigot était un instrument de musique qui a servi de métaphore aux buveurs insatiables :  ils faisaient sortir le vin des bouteilles comme on faisait sortir le son de l’instrument.

Bref ça buvait et ça causait mais on n’avançait pas.

Or précisément notre job c’est d’avancer.

Avancer ce n’est pas seulement une question de kilomètres parcourus, c’est, plus que jamais, avancer en sagesse.

Pour préparer « le coup d’après », la sortie du tunnel, pour envisager l’avenir avec sagesse, il faut, on le sait bien, se préparer à un certain nombre de ruptures, de mutations.

Aux voyageurs impénitents dans le monde d’avant, le monde d’après va leur réserver quoi ?

Nous sommes – et le monde entier avec nous, c’est impressionnant ! – en train d’expérimenter une nouvelle forme de mobilité.

Je pourrais commencer par citer le Voyage autour de ma chambre de Xavier de Mestre (1794, tout de même) que je viens de relire et qui est exquis. 

Notez bien que, malgré les apparences, le citer n’est pas pédant du tout. C’est la lecture à la mode dans les réseaux sociaux.

De Mestre a l’intuition tout à fait remarquable des deux corps du moi  . De même qu’on parlait , avant qu’on leur coupe la tête, des deux corps du Roi, le profane et le sacré, il parle de l’âme et de la bête qui sont les deux identités qui le compose lui, dans sa petite chambre et dans les 42 jours de son enfermement. 

La période actuelle nous pousse à méditer sur les deux corps de la modernité de chacun : le corps sédentaire et le corps nomade.

De fait la modernité c’était ça : 

voyager (plus ou moins loin) – corps nomade

appartenir à un clan, une tribu, un lieu – corps sédentaire.

Et demain ?

Allons-nous assister à une hybridation entre les deux : une mobilité immobile !? et si oui quel challenge ! !

L’allusion au vin au début de ce texte mérite un petit recyclage. On a raconté dans d’autres cercles  que le vin était un principe ralentisseur de la vitesse insupportable du monde.

Le monde qui vient sera-t-il radicalement différent de celui d’avant? Et le vin ? Tiens, le vin justement – j’ai fouillé dans le littérature de science-fiction mais peut-être pas assez…toujours est-il que j’ai le sentiment que le vin est le héros immuable des mêmes scènes, des mêmes émotions… quand tout change, quand on explore le cosmos ou le centre de la terre, le vin reste l’intouchable et l’intouché… l’éternel breuvage qui permet de déguster l’instant, de savourer l’autre, de ressentir l’existence.

J’hésite: si c’est le cas, est-ce une bonne nouvelle ? une mauvaise? une fake news ? un vœu pieux ?

Pendant ce temps une frénésie sympathique s’est emparée de nos cuisines. Tout le monde s’y met pour occuper les enfants ou tromper l’ennui. Triomphe annoncé du retour des confitures ?

J’ai cherché en vain une étymologie commune… confiture c’est faire avec…con (ensemble) et fingere (faire) ; confinement c’est une histoire de confins, de frontières. Je ne pouvais pas en rester là. En 1607, Honoré d’Urfé propose le verbe conserver pour protéger de quelque chose (Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales, consulté ce jour) … de quoi se protègera-t-on avec la confiture?

J’ai une piste : Hermès, mon Dieu de L’Olympe favori,  est en autres le dieu des frontières, le dieu des confins et c’est un sacré loustic … c’est le dieu des voleurs… le plus rusé de la famille…

Comme il est un peu magicien, beaucoup alchimiste, il va nous concocter quelque chose …

Mais je retiens surtout de ma fréquentation avec lui, c’est qu’il est le plus rusé des Dieux et que ce qui va nous aider à nous en sortir après cette période étonnante c’est justement d’être malin, de ne pas nous laisser avoir par tous les stéréotypes et autres clichés qui vont nous envahir de toutes parts.

Bref de quoi réfléchir pour renouveler nos façons de penser.

Je ne crois pas trop que du passé nous allons faire table rase mais on va sûrement mythifier cette période covidienne et les éventuelles bifurcations qui seront proposées vont explorer des imaginaires sociaux croustillants…


Tout va-t-il changer ou « l’évènement covid » restera-t-il comme une étrange parenthèse qui sera pour les uns le radeau de la Méduse ou pour les autres l’Arche de Noé ?

Après tout Noé fut le premier vigneron et nous buvons encore. C’est l’Arche qui gagne contre le Radeau. Le larigot a encore de beaux jours devant lui.



ODON A VANNES 4.02.2020
31 janvier 2020, 14 h 19 mi
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ODON VANNES FEVRIER 2020.jpg



Ll faut lire St Epondyle lisant Damasio
22 janvier 2020, 16 h 49 mi
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CHRISTIAN GATARD
Idées | Il faut lire St Epondyle lisant Damasio

 

Quand la Science-Fiction se fait source d’inspiration radicale (https://saint-epondyle.net/blog/)

Lire L’étoffe dont sont tissés les vents , sous titré Autour de la Horde du Contrevent d’Alain Damasio d’Antoine St. Epondyle vaut visite de cathédrale. Le guide est généreusement sachant. Il entraine dans les hypostyles et les sous-sols, les galeries et les triforiums, fait pencher la tête quand les voutes sont basses et voir loin dans les plus petites ouvertures. Il fait beaucoup plus que commenter le livre qu’il nous offre à sa dév/ad/oration, Il l’emparouille et l’endosque contre terre ; il le rague et le roupète jusqu’à son drâle … Enfin il l’écorcobalisse. Ah mon Michaux favori ! Tu nous manques mais tu as su semer tes petites graines néologiques et performatives. C’est que le St. Epondyle c’est beaucoup plus qu’un commentaire ou une savante analyse, c’est une reconstruction, une recréation ou si vous me laissez inventer un mot : une « recréaction » qui serait un mot valise contenant tout ce qu’en dit sa lecture à voix haute.

Comment ça marche?

Il faut sans doute avoir lu le livre princeps, La Horde du Contre-vent , et en avoir goûté les joies étranges, les parcours bifurquants, les intensités. Il faut ensuite accepter la règle du jeu de la culture savante  (les notes de bas de page) quand St. Epondyle vous balade à la rencontre de quelques-uns de ces géants sur les épaules desquels vous vous étiez assis autrefois. Je les salue à leur passage avec un plaisir sincère, peut-être un peu nostalgique. Damasio a ses maitres et a fait migrer leurs options philosophiques, sociétales et autres au cœur de son récit. C’est de bonne guerre. St.Epondyle les convoque aux moments opportuns, nous expliquant la stratégie de chacun. Welcome Deleuze, Spinoza, Nietzche, Eluard et consorts qui se relisent et se recomprennent dans un savant jeu de miroirs : ça bondit du livre de Damasio vers celui de St. Epondyle , ça ricoche sur les souvenirs émus de vos déambulations sur les épaules de ces hommes illustres. Les explications, les citations, les éclaircissements se réverbèrent, s’éblouissent, passent d’un régime à l’autre comme on dit d’un moteur ou d’un système politique, c’est-à-dire qu’ils accélèrent la pensée du monde et son devenir. Ainsi en est-il sans doute de la pensée conquérante.

Car Damasio est un guerrier. Sa présence médiatique en est la preuve. Et il est lui-même une expérience multiforme : pas si facile d’en prendre la mesure. J’avais lu La Horde il y a quelques années, rencontré Damasio à la librairie parisienne Charybde quand elle était encore rue de Charenton – rencontré c’est un peu prétentieux, il m’avait dédicacé le bouquin sans me regarder – il avait l’air épuisé, comment lui en vouloir ? Nous nous sommes croisés à nouveau aux Intergalactiques à Lyon où il était cette fois tout joyeux et souriant en compagnie de son père et me qualifiait de sociologue de service – je ne sais plus trop pourquoi mais c’était dit avec bonne humeur, malgré la méfiance que cette partie de mon activité professionnelle éveillait en lui. Puis j’ai lu Les furtifs qui était en train de devenir l’évènement littéraire de la rentrée. Peut-être avec moins d’enthousiasme que La Horde. Peut-être parce que les prises de position politique de l’auteur étaient – ça et là – un peu trop évidentes et gâchaient – parfois – le plaisir. Mais St. Epondyle relève dans son analyse de La Horde des prises de positions plus subtiles, plus puissantes que les évocations plus ou moins annonciatrices des Gilets Jaunes dans Les furtifs – dont les Lupercales romaines sont peut-être les ancêtres. Mais c’est une autre histoire.

N’empêche que Les furtifs est un bouquin épatant et inspirant et mes critiques un peu mesquines.

Mais il ne s’agit ici ni des Furtifs ni même de la Horde du contre-vent.

Il s’agit de l’expérience qu’en fait St Epondyle et que je saisis au bond, tout étonné d’une pareille trouvaille. Il s’agit de l’effet St.Epondyle sur… euh … moi.

A la métaphore de la cathédrale j’ajouterais bien une couche musicale.  St. Epondyle se fait le chef d’un orchestre tapi dans l’ombre, dans les coursives du monument qu’il nous fait visiter, dans le secret de l’édifice. Il place les sources sonores dans les endroits les plus inattendus et l’effet est puissant. Il y a un vibrato de Fulcanelli et de ses lectures ésotériques des cathédrales, des adagios savants évoquant les analyses sémiotiques des années 60 : dénicher, repérer, traquer les symboles, les inventer si besoin car ce qui comptait c’est l’expérience de lecture et qu’à un moment donné l’auteur s’effaçait au profit de la pure jouissance du texte. Barthes, Genette…Je ne suis pas sûr que je comprenais tout de leur jargon mais cela avait un parfum irrésistible de conquête de l’esprit, traquant chez les auteurs étudiés leurs relations au monde, leurs façons d’apprivoiser immanence et transcendance. Plus tard la lecture de la Mort de Virgile de Broch, provoqua en moi une émotion pure et incontrôlable, à cause ou malgré ses phrases de 18 pages. Il y a quelque chose de la Sarabande de Haendel quand Virgile regarde la grosse malle qui enferme l’Eneïde. Il m’est arrivé avec le St.Epondyle une expérience de lecture de cet acabit, les phrases de 18 pages en moins.

St Epondyle fait vibrer les cordes d’une modernité surgissante, prête à mordre, masquée, planquée derrière le roman cybergothique de Damasio. Une sculpture littéraire enceinte d’un passé abyssal.  Hybridation. Tu te penches en avant, tu regardes en arrière. Tu as l’hybridation des temps. Que St. Epondyle fait surgir. Et c’est ce surgissement qui est une œuvre en soi.

Le vent damasien, (les vents qui sifflent dans le paysage, dans les oreilles, dans les yeux… ces vents)  pousse dans la plaine et fait rouler sur le sol des trucs et des machins dont je ne sais pas si ce sont des débris ontologiques éparpillés après un effondrement général du cosmos ou des poussières d’étoiles en train de se reconstituer pour refabriquer l’humanité.

Ces trucs et ces machins sont les 23 personnages géniaux, époustouflants, somptueux de la Horde qui avance vers l’Extrême-Amont qui est l’Extrême-Aval…  et là je spoile peut-être mais avec 150,000 exemplaires vendus c’est pas trop grave et surtout  ça – ce retour à la case départ – c’est dans le Damasio.

St. Epondyle sur les épaules de Damasio traque autre chose, m’emmène ailleurs, me fait voir des choses derrière des choses, des mythes derrière les hordiers, et pas des mythes connus, repérés qui seraient en quelque sorte recyclés et sans doute un peu banals. Je soupçonne, je suppute, je sais que ce sont des formes, des gènes, des râles de mythes probablement plus anciens, plus essentiels que ne le savent Damasio, St Epondyle, ou moi-même. Ces choses en formation ou en désintégration proviennent d’une trajectoire temporelle : Big Bang hypothétique des grands commencements ? Big Crunch promis des grands effondrements ? De cette trajectoire je ne sais plus si elle est en boucle (récits des éternels retours), en flèche (récits du progrès de Joachim de Flore à Auguste Comte) ou peut-être en spirale (récits de Laurent Courau et de quelques autres dont je fais partie parfois).

La beauté de la chose est que les paris sont ouverts.

On a vu que Damasio parie plutôt sur l’hypothèse du cycle avec le serpent qui se mord la queue quand l’Amont et l’Aval se rejoignent. Petite incidente : Amon était à l’origine le dieu des vents chez les Égyptiens. Pas sûr que ça apporte grand-chose.

Ces perspectives vertigineuses, doucement enivrantes, n’épuisent pas la lecture. L’instant suivant, la page d’après, on repart avec la horde , celle du terrain aride , on se coltine les hordiers , on prend le vent.

Pas de tout repos, tout ça.

C’est d’autant plus fascinant que mon chauffeur de taxi tout à l’heure contemplait l’océan devant Lomé et annonçait l’harmattan pour bientôt comme s’il avait deviné le langage à tenir. C’est d’autant plus étonnant que je me demande quelle mouche équatoriale m’a piqué pour que je ressente une telle fascination pour la trajectoire de lecture que propose St. Epondyle et que j’écris ce texte à l’Hotel Onomo du nom du dieu serpent qui pourrait être le Quetzalcóatl local et, se mordant la queue , une  réponse à la question de la trajectoire décrite plus haut : le cycle et l’éternel retour.

Parce que voyez vous vous n’avez encore rien vu.

Je lis et relis le St . Epondyle… quel nom incroyable ! est-ce son vrai nom ? un nom d’emprunt ? un faux nez ?  Question triviale, il y en a bien d’autres en suspension… a-t-il déchiffré les hiéroglyphes hordiens à la façon d’un Champollion qui aurait trouvé son Damasio , décrypté une mythologie . En a-t-il créé une … ?

Gilbert Durand décryptait les structures anthropologiques de l’imaginaire au début des années 60 du siècle dernier et je les découvrais  à la fin de cette lointaine décennie, avec une émotion qui ressemble à celle que j’éprouve en lisant St. Epondyle. J’ai quelques autres occurrences de ce genre de scène, de « faits de lecture ».  Elles ne sont pas si nombreuses mais ce sont des étapes qui comptent, des sites de ma propre archéologie que je revisite parfois, toujours avec la même émotion. Il me faut y revenir : le Broch convoquant Virgile, le bouquin de Norman Cohn sur les fanatiques de l’Apocalypse, celui sur les Religions Chinoises de Anne Cheng. Dune, sans doute…

Il s’y passe quelque chose comme une émeute de la pensée, un bouleversement de l’ordre intellectuel établi. Ce que proposent ces auteurs, à ce moment-là, qui est sûrement un moment particulier de ma vigilance (ou plutôt de mon absence de vigilance) c’est une transformation alchimique de la matière qu’ils traitent.

Je me dis que leur sujet (Virgile et Auguste, les millénaristes, les sages de l’empire du milieu , les fremen… et donc St. Epondyle et les hordiers de Damasio) se détache de leurs bases référentielles ou romanesques, prend son autonomie et part à la dérive dans la mare imaginalis « cette mer imaginaire sur laquelle vogue l’être humain qui de siècles en siècles et quels que soient les lieux et les époques, demeurent le lien fondamental de nos consciences »

Le sujet s’est peu à peu détaché de ces banquises intellectuelles pour devenir une œuvre totalement autonome, recréée, réinventée, mise en scène :  œuvre d’art majeure, iceberg à la dérive, dérive inspirante, abreuvante… que devient la glace ensoleillée devant les côtes africaines ? L’iceberg s’est dissout dans l’océan mais l’eau ? qu’est devenu cette eau ?

St.Epondyle la fait surgir.

Page 113, par exemple….Néphèsh. Souffle de vie, magie de la création par le langage. Neuvième fonction du langage selon Laurent Binet ? Fonction performative….qu’est-ce que cela pourrait être, une  performation ? Une révélation par excès, dit le dictionnaire… je suis preneur… l’excès de sens c’est très St.Epondilien. C’est une forme d’ivresse. Un moyen d’abaissement de la conscience nécessaire à la révélation des secrets de la nature dont l’essence était symboliquement représentée par un accomplissement érotique et sacré – l’union de Dionysos et d’Ariane. L’érotique dans le Damasio est assez rugueuse autant que je me souvienne mais il ne s’agit pas de revenir au livre princeps – c’est toujours tentant – mais de chevaucher son avatar,  le St. Epondyle qui en est bien plus que l’écho : une expédition en terra incognita, une performance parallèle, une tribu oubliée d’Israël que je retrouve au détour de ma propre exploration et qui pose la question de savoir qui invente quoi dans cette lecture que j’en fais.

Est-ce une invention récente ? Par exemple le moment où Damasio écrivait ça  – ce n’est pas très ancien-  ou une invention plus récente encore, celle de St. Epondyle écrivant ça sur ça, explorant les chambres secrètes de ça, (et qui n’a pas grand-chose à voir avec l’écosystème freudien qui l’a récupéré)…  voire l’invention d’il y a un instant, celle de la seconde même où j’ai lu le chapitre – et là j’ai pensé à cette étrange théorie qui veut qu’on ne rêve jamais le même rêve et lorsque l’on croit rêver encore et encore le même rêve, c’est une illusion onirique. Tout est création de l’instant. Fascinante hypothèse à laquelle je ne crois pas beaucoup mais qui a le mérite de rendre la vie encore plus excitante en suggérant que tout est neuf tout le temps. Mais en fait, non. Je n’y crois pas.

St. Epondyle visite un site archéologique, certes mythique, mais arkhé , ca ne veut pas dire tout jeune. Trouvaille archéologique, donc. Et pour une trouvaille c’est une trouvaille mais plutôt du genre trésor qu’on découvre, qu’on invente comme on dit, parce que l’impression que j’ai c’est que ce n’est pas une création littéraire mais une recréaction comme j’ai dit tout à l’heure avec ce mot qui ne veut pas encore dire grand-chose mais quand même quand on s’y penche ça commence à faire sens

Le site a été inventé par Alain Damasio, c’est entendu. On peut soupçonner que ce dernier l’a dérobé à l’histoire secrète du monde. Ou pour employer une formule moins affectée Damasio a écrit un récit des origines et des fins dernières qui vaut tous les récits mythologiques.

J’avais d’abord eu une réserve :  pour être en mesure de gouter pleinement les révélations de Damasio et les commentaires de St. Epondyle, j’ai cru qu’il fallait être au bon endroit, au bon moment. Un peu comme pour observer le rayon vert. J’allais vous souhaiter de trouver le bon endroit, le bon moment ayant eu la chance que ces bons endroits et ces bons moments aient été à chaque page. Sauf que (toujours dans ces sacrées notes de bas de page) je me suis rendu compte que des tas de gens ont eux aussi observé le rayon vert se poser sur le monde hordien. Sur celui de St.Epondyle, je ne sais pas encore mais il y a assez de monde dans la galaxie damasienne pour  ça se bouscule assez vite en Extrême-Amont et Aval de notre affaire.

Je suis entré dans le livre sans trop savoir où j’allais, le recevant par la poste après que St. Epondyle en fit la promo sur le net. Je n’ai plus tout à fait en mémoire les circonstances. J’ai du faire partie des early  birds qui avaient demandé de recevoir le bouquin  alors qu’il n’était pas encore sous presse.

Ce qui n’est pas anecdotique.

Ca vaut son pesant de Spinoza quand St Epondyle le convoque page 137 pour lui faire dire qu’on est plus libre quand on sait qu’on ne l’est pas que quand on croit qu’on l’est, ce qui rejoint Deleuze et les vagues d’énergie sur lesquelles il faut surfer pour émerger à soi-même. Mais ce genre d’assertions ou de constats n’est pas bouleversant en soi. C’est même une potion philosophique qui m’accompagne depuis toujours. Ce n’est pas là le « feu central » de l’affaire comme dirait Luc Dellisse. Non. Ce qui se passe ici, et c’est vrai dans de nombreuses pages, c’est le sentiment de participer à un évènement, une rencontre certes hors sol mais décidément réelle, qui me place dans l’intimité de la pensée des hommes illustres qui ont posé leurs sacs de voyage dans la page, qui se sont assis à la table de l’auberge St. Epondyle et qui me parlent d’égal à égal. Ce n’est pas que j’en fasse un truc narcissique, c’est juste qu’on parle ensemble parce qu’on est tous des voyageurs, qu’on s’est arrêté là, en cet instant-là, invité par St. Epondyle, St Aubergiste, on bouffe à l’œil et on boit la cuvée offerte par le patron.

La conversation tourne autour de nos aventures communes.

Sloterdijk raconte comment il est descendu de la pierre en ceci que la maîtrise technique ouvra la possibilité du devenir-humain. Je fais celui qui est au courant. Je me dis que c’est un peu à l’image de ce silex incrusté de leds que j’utilise dans mes interventions. Mais c’est beaucoup plus fort quand c’est lui , Sloterdijk, qui raconte.

La nuit descend sur l’auberge . Spinoza tombe de fatigue. Il murmure dans un demi sommeil qu’un désir qui nait de la joie est plus fort qu’un désir qui nait de la tristesse. Damasio , peur de rien, se perche sur ses épaules et crie à la cantonade un truc que j’entends pas dans le tumulte du départ de tous ces saltimbanques vers leurs chambrées.

St. Epondyle m’offre un dernier verre.

 

Novembre 2019, Lomé



MYTHANALYSE DU FOCUS GROUP
3 juin 2019, 15 h 46 mi
Filed under: Non classé

Mythanalyse du focus groupe Contribution buissonnière à la méthode prospectiviste.

Illustration Marie Caulliezis online

Christian Gatard

Etudes qualitatives internationales @CHRISTIANGATARD AND CO et p… See more

Notre métier est inconnu du grand public …

… et sans doute assez mal connu des entreprises et des institutions qui nous sollicitent. Pourtant nous sommes à la charnière de la rencontre entre les uns et les autres. Il y a quelque chose d’un peu mystérieux dans le rôle que nous jouons. Savons-nous mêmes de quoi il en retourne ?

La question mérite peut-être

cette réflexion sur notre histoire

et l’imaginaire qui la sous-tend.

Sommes-nous créateur ou serviteur des informations que nous cherchons?

Sommes-nous artiste ou savant?

Observateur ou acteur?

À quoi sert de voir?

À quoi sert de dire?

Ces questions sont au cœur de notre activité.

Nous prenons l’homme comme objet d’étude. La spécificité du qualitatif est un regard sur le singulier plutôt que le pluriel, adossé au singulier, puisant dans le singulier le sens du pluriel.

Nous travaillons sur des nombres restreints.

Nous cherchons à comprendre l’homme en tant que semblable et autre tout ensemble.

Le qualitatif , c’est l’écoute de l’individu comme émanation, symbole, métonymie du grand nombre.

Nous cherchons à saisir l’homme dans sa diversité. Le qualitatif sert à discerner l’unique et à le privilégier, le sacraliser.

À quoi cela sert-il?

À comprendre et raconter l’homme pour accéder à une vue opératoire sur son mode d’intervention sur la nature.

A satisfaire des besoins collectifs et individuels.

Peut-être à maintenir en place l’économie générale du système dans lequel nous vivons. Et/ ou, disons le sans fard, à satisfaire les actionnaires de nos commanditaires.

Bref à disséquer puis faire triompher les marques comme divinités contemporaines, nouveaux contes et légendes…

Explorons.

On a pu dire des sciences sociales qu’elles étaient filles de Mars et d’Hermès, plus peut-être que de Minerve. A ce titre elles sont associées, depuis les temps les plus reculés, aux fonctions de lutte, d’échange et de reproduction essentielles à toute société.

Mars, dieu de la guerre, technicien des combats, Hermès dieu des marchands, des voleurs et des espaces ouverts, Minerve, patronne des artisans et peut-être de l’arithmétique, peuvent donc être convoqués pour y voir plus clair.

Les sciences sociales n’ont pas forcément bonne presse : on y voit des savoirs entièrement asservis aux différents pouvoirs et recelant des potentialités machiavéliques d’asservissement et de manipulations.

Ma première réaction :

Ne nous laissons pas faire par ces poncifs d’un autre âge.

Et puis au fond :

Peut-être s’agit-il de maintenir en place l’économie générale du système dans lequel nous vivons ?

Peut-être une économie « ontologique » dont il serait vain de vouloir faire table rase…

Plus précisément quel est le feu central du qualitatif ?

Son acte fondateur ? Son symbole référentiel ?

Le focus group.

Lieu symbolique au cœur de notre métier, le groupe est au centre d’un imaginaire essentiel. Stade ou temple, théâtre ou arène, prison ou salle de jeux, salle à manger/être mangé…

Le focus groupe est un lieu observé, épié, ouvert, c’est une table d’opération, de dissection, de révélation… C’est un lieu où la parole dite cache l’essentiel, le non dit qui dit tout, où la « question » renvoie à les mots à leurs origines : salle de torture? Lieu d’inquisition ? Lieu de défense d’un ordre? L’ordre capitaliste? L’ordre de la doxa? Ou lieu d’extase? De convivialité? De fusion? De rencontre? Lieu de convergence, de consensus? Ou lieu de création? Lieu d’utopie?

Lieu, donc, de tous les contes populaires, de toutes les paroles des peuples, lieu de méditation active des industries de notre temps.

Qui pose – enfin – la question de la place du qualitativiste…

Qui suis-je, donc, au centre de toutes ces questions ?

Le souci de compter et de se compter remonte aux plus anciennes civilisations connues et façonnent les premières connaissances concrètes du social.

L’essentiel est bien évidemment la valeur symbolique des nombres avancés, valeur éminemment religieuse et sacrée. Il faut être constamment conscient de cette extraordinaire magie du nombre que l’on rencontre sans cesse associée aux prophétismes et aux utopies, de la Bible au pythagoriciens, à Platon, à l’Apocalypse, jusqu’à l’extraordinaire combinatoire des passions de Fourier. Si les nombres ont eu une valeur magique pour les quantitavistes, quelle est la part symbolique du qualitatif ?

D’une certaine façon…notre « histoire » a un fil rouge…

La Méditerranée est le berceau de notre ethnocentrisme.

Nos ancêtres ? je relis pour vous quelques passages de notre moderne encyclopédie si vous m’y autorisez… j’imagine parfois que sous l’arbre à palabres de leurs randonnées il leur est arrivé d’animer des groupes de badauds, des cohortes de commères observatrices et malignes qui leur racontaient la vie…

Si ça vous saoule passez la liste de ces hommes illustres…mais ce mémo vous permettra de frimer lors de vos dîners en ville.

Hésiode, théologien laboureur (VIIIe-VIIe siècle avant J.-C.), poète, théologien, prophète. C’était un petit paysan béotien de la fin du VIIIe siècle avant J.-C. Il fut contemporain de la première vague de colonisation qui pousse les Grecs à chercher de nouvelles terres. Il se situe à la jointure de deux mondes et de deux systèmes de pensée. Avec la Théogonie il raconte l’avènement de la souveraineté de Zeus et développe le mythe des races. Par Les Travaux et les jours , le théologien cède la place à un laboureur qui parle de dettes, de faim amère, qui invective les puissants de la Béotie et tonne contre les rois voraces. C’est déjà la perspective de la cité, avec ses conflits, ses angoisses et ses promesses.

Diodore, grand voyageur, historien grec né à Agyrium en Sicile, consacre sa vie à la composition d’une histoire universelle en quarante livres, qui va des temps mythologiques à Jules César, et intitulée Bibliothèque historique . Pour acquérir sur les lieux une connaissance plus complète que celle des historiens précédents, il voyage beaucoup en Europe et en Asie. Ainsi il mêlera ses propres observations aux matériaux recueillis dans les livres qu’il compulse. Son œuvre est une mine de renseignements sur les sciences physiques et naturelles, sur l’archéologie, la géographie et l’ethnographie, non seulement en ce qui concerne la Sicile et la Grèce, mais aussi la Gaule, l’Ibérie, l’Égypte, l’Éthiopie, l’Arabie et l’Inde.

Strabon, ( 63 env.-env. 25) avait une vision holistique. Déjà. C’est celle-là que nous cherchons tous. Historien et géographe grec, il fit plusieurs séjours à Rome, dont le premier l’année même de la mort de César (44). Les hautes relations qu’il y acquit lui facilitèrent l’entreprise de nombreux grands voyages, tels que la remontée du Nil jusqu’à l’île de Philae (Assouan), qu’il accomplit avec le gouverneur Aelius Gallus. Strabon s’était senti d’abord une vocation d’historien et avait écrit quarante-sept livres de Commentaires historiques . Il conçut la nécessité d’une description générale de la terre habitée, d’un point de vue non seulement scientifique, en raison des liens indissolubles entre l’histoire et la géographie, mais aussi politique, dans le dessein d’être utile aux «gens haut placés» dans leur tâche de gouvernement.

Tacite, environ (55-120) , fut «le plus grand peintre de l’Antiquité» mais on conteste sa valeur d’historien, on nie à la fois son objectivité et la rigueur de son information, on se défie de ce témoin trop passionné. Le qualitativiste n’encourt-il pas toujours ce risque ? La Germanie , rédigée vers le même moment que l’Agricola , reprend ce dernier thème; sous les apparences d’une conférence mondaine, et à travers un style magnifique, elle laisse percer à la fois une méthode et une philosophie de l’histoire. Cette méthode est celle de l’ethnologie . La finesse de ses analyses psychologiques a beaucoup inspiré Corneille et Racine. Cette psychologie conduit toujours à une réflexion politique: Montaigne le disait déjà, c’est plus «jugement que déduction d’histoire».

Polybe (entre 210 et 202-126 environ avant J.-C.) fait des parallèles culturels. N’est-ce pas ce qu’on nous demande dans les coordinations internationales ? La conquête du bassin méditerranéen par Rome fut l’un des événements qui marquèrent le plus l’histoire humaine. La période décisive de cette expansion se place au IIe siècle avant J.-C.: victorieuse de Carthage dans les dernières années du IIIe siècle, Rome se lança ensuite dans l’aventure impérialiste avec une résolution de plus en plus nette. Polybe fut le témoin de ces événements; il chercha avec passion à en tirer la leçon et à comprendre son temps. Son œuvre constitue un document capital sur une phase décisive de l’histoire du monde. Esprit d’une rare profondeur, il renouvela la méthode historique, tant au niveau de l’analyse objective des faits qu’à celui de la vision synthétique de l’évolution d’ensemble. Il mérite d’être considéré, avec Thucydide, comme le plus grand historien de l’Antiquité.

Thucydide ( Ve siècle avant J.-C.) occupe , lui, une place unique parmi les historiens. Racontant une guerre qu’il avait vécue, il en a donné une analyse si profonde qu’il a réussi à en faire, comme il se l’était proposé, une «acquisition pour toujours», où chaque époque apprend, à travers ce récit du Ve siècle avant J.-C., à mieux comprendre ce qu’elle vit. Thucydide a raconté la guerre du Péloponnèse, c’est-à-dire l’affrontement qui, de 431 à 404 avant J.-C., opposa les deux grandes cités grecques alors à leur apogée: Sparte et Athènes. Il déclare vouloir faire œuvre utile en permettant de mieux comprendre non seulement les événements qu’il rapportait, mais encore «ceux qui, à l’avenir, en vertu du caractère humain qui est le leur, seront semblables ou analogues»

Et tant d’autres…

Posidonios qui a pressenti la psychologie des peuples, Hérodote qui a conçu la première étude différentielle des sociétés humaines. Pline l’Ancien fut chercheur de faits qui sortent de l’ordinaire…

Platon avant eux avait étudié la question du vivre ensemble : « Tant que les philosophes ne seront pas rois dans la cité (…) il n’y aura de cesse (…) aux maux du genre humain » La République 473 B

Au Moyen Age Ibn Khaldoum (1332-1406) fonde une théorie des cycles sociaux, rythmés par la domination des groupes, partis ou dynastie qui finissent, au bout d’un siècle par s’épuiser au pouvoir. : « L’histoire a pour véritable objet de nous faire comprendre l’état social de l’homme, c’est à dire la civilisation »

A la Renaissance, pour Copernic, 1473-1543, toutes les planètes tournent autour du Soleil, et la Terre n’est plus qu’une planète comme les autres : son œuvre ébranle la vision médiévale du monde, qui plaçait l’homme au centre d’un univers fait pour lui. Il nous faut parfois avoir le même courage avec nos clients.

Evidemment de telles références sont bien prétentieuses.

Mais les interfaces, les découvreurs, les inventeurs de passages ont préparé le terrain que nous foulons.

Hiuan-tsang envoyé de Chine en Inde au VIIème siècle en pèlerinage aux sources fit rédiger par un disciple un Mémoire sur les contrées occidentales.Et Yi-tsing écrit la Relation sur les moins éminents qui partirent à la découverte de la Loi en Occident (VIIème siècle). Nous avons beaucoup à apprendre de nos partenaires internationaux.

Plan Carpin, (1182 env.-1252) fut moine franciscain. Originaire de Pérouse, Giovanni dal Piano dei Carpini part pour Qaraqorum en qualité d’ambassadeur extraordinaire d’Innocent IV auprès du Grand Khan. Intellectuel doué d’un excellent esprit d’observation, il s’efforce de se dégager des préjugés et des légendes de son temps.

Aux observations géographiques et climatiques s’ajoutait une moisson de renseignements sur les peuples rencontrés, sur leurs mœurs, sur leur organisation politique et militaire, sur leur religion. Il y laissait parfois percer sa sympathie pour les Mongols, leur pauvreté, leurs mœurs patriarcales, leur morale austère, et cela malgré le froid, la faim, les fatigues et les dangers endurés pendant le voyage. Il a ouvert la voie des échanges entre l’Orient et l’Occident, que la «paix mongole» va favoriser durant quelques décennies. Bel exemple de l’internationale qualitativiste !

Les lignes et paragraphes qui précèdent peuvent paraitre fastidieux pour les uns , curieux pour les autres, fascinants pour deux ou trois lecteurs et lectrices de bonne humeur ? Je les ai glanées çà et là sans toujours pouvoir aujourd’hui donner crédit – mes lectures, Wikipedia, bien sûr, ma propre bibliothèque qui déborde de nos jours et que je concentre sur ma tablette. Je relis avec curiosité moi aussi cette cueillette buissonnière. Il ne s’agit pas de name dropping. Ces personnages m‘accompagnent. Bricolage de compagnons de route, rencontres imprévues, passages d’entretiens sur Youtube… Ces gens-là sont tout aussi inspirants que les participants aux innombrables réunions de groupes que j’ai animées depuis des dizaines d’années avec le même plaisir.

Tout cela donne quoi?

Quelles sont les clés de notre part symbolique contemporaine?

Voyageurs & Missionnaires de nos propres cultures (au coeur de chacune de nos terra incognita), inventeurs d’archives oubliées à redécouvrir – archives réelles dans les livres que nos desk research nous amènent à exploiter et archives fantasmatiques dans l’inconscient collectif, chercheurs de tradition orale à révéler (contes , proverbes, chansons, publicités…), de liens avec le pouvoir et les pouvoirs, (les Princes, les Multinationales) avons-nous une pensée libre ? Ou nos pensées sont-elles alliées des puissants et des pouvoirs?

Qui saura le dire ?

Posons nous donc la question de notre rôle – enfin !

Où jouons nous ?

Quelque part entre les fournisseurs d’un bien et ses consommateurs, entre le capital et le travail, entre l’offre et la demande, entre le vendeur et l’acheteur, entre le seigneur et le saigné, entre le sacré et le profane…

Nous sommes au cœur d’une médiation…

De quel type ?

Révélons notre véritable mythe fondateur :

Nous sommes, entre les Esprits et les Hommes, shamans. Entre le sol et les hommes, cultivateurs, entre Dieu et ses prêtres, consommateur, entre le respect et l’irrespect, bouffons, entre le cru et le cuit, Indiana Jones.

Bref des utopistes !

Le terme d’utopie, inconnu du grec, a été forgé par Thomas More pour figurer la « meilleure des Républiques» sise en la nouvelle île d’Utopie. Le texte, publié à Louvain en novembre 1516, allait rencontrer aussitôt une audience exceptionnelle dans l’intelligentsia européenne et caractériser non seulement un genre littéraire mais une littérature sociologique.

Et notre utopie vaut le coût : rêver une vie future peut être plus réelle que nos rêves les plus fous, mobiliser les forces de l’imaginaire pour transformer le réel, donner le pouvoir aux idées, aux rêves, aux aspirations.

Notre lieu symbolique par excellence, le focus group, n’est-il pas une utopie éphémère, ludique, volatile et essentielle à la compréhension de l’imaginaire de la consommation?

Nous sommes des gens curieux : l’histoire de la curiosité suit comme une ombre l’histoire des objets dans leurs rapports avec notre désir, du plus inavoué (jouissance du collectionneur plus ou moins fétichiste) au plus honorable (amateur, chercheur…).

Le focus groupe serait-il le lieu de la réinvention de soi, le réenchantement du monde au travers de notre regard ?

Ces rencontres réelles (les gens d’aujourd’hui) et virtuelles (les gens dans l’Histoire) sont la matière brute de la prospective vers laquelle j’ai fait évoluer mon métier depuis une dizaine d’années mais elles ont été là depuis le départ, telles des braises qui ne savaient pas encore leur nom.

Penser le devenir, tenter une sociologie de l’avenir, se situe donc entre l’intérêt culturel (prendre de l’avance sur l’avenir, s’y préparer) et le légendaire (comprendre les rouages profonds de l’histoire des hommes, interroger les mythes, émouvoir, repérer notre place dans la longue durée). Il s’agit de s’intéresser aux « horizons des attentes », c’est à dire à des scenarios dont on perçoit dès aujourd’hui les prémices. C’est un futur proche, parfois déjà là, parfois dans un horizon plus lointain mais qu’on sent en devenir. On peut pour partie prolonger les courbes du présent. Pour partie seulement car le futur ne nous doit rien et n’en fera qu’à sa tête.

AVRIL 2019



Le fripon divin qui est aux dieux ce que l’île est au continent
29 avril 2018, 12 h 44 mi
Filed under: Non classé

CACONTRIBUTION DE CHRISTIAN GATARD
Conférence 22 mai 2018 CATANE SICILE
à l’invitation de ORAZIO MARIA VALASTRO
COLOQUE MYTHANALYSE

Le fripon divin qui est aux dieux ce que l’île est au continent

Le fripon divin est présent dans toutes les cultures . Il joue des tours pendables, possède une activité désordonnée incessante, une sexualité débordante. Il est une personnalité chaotique, à la fois bonne et mauvaise, une sorte de médiateur entre le divin et l’homme. Il passe avec facilité de l’autodérision au sérieux le plus total ; mourir, renaître, voyager dans l’au-delà et conter sont certains de ses attributs. Il est indispensable à la société : sans lui, elle serait sans âme.
Claire DORLY parle de sa dérangeante diversité dans les registres de l’ombre et c’est précisément dans ces registres que l’on pourrait situer ce que les anglo-saxons nomment le trickster.
S’il est une créature mythique des légendes, il est aussi une composante de notre âme. Celle qui permet à l’enfant et plus tard à l’adulte d’avoir ce dialogue intérieur qui lui permet de se situer dans le monde et de grandir toujours, de se renouveler toujours.
Nous partirons de ce constat pour situer le rôle symbolique de l’île qu’on dira être au continent ce que le fripon est aux dieux qu’il nargue et désarçonne, aux hommes les héros espiègles et narquois que sont Maïtre Renart, Till l’espiègle, Loki, Puck et tant d’autres, aux femmes Lilith (la première femme d’Adam) , Ishtar (la dame provocatrice de Babylone)…
Dans l’Odyssée combien d’îles pour combien d’aventures différentes pour le rusé Ulysse ?
L’effet île concentre dans l’Odyssée les représentations du désir amoureux, mais aussi de l’abandon et de la solitude et surtout, l’aimantation indéfectible de l’île … L’île, surtout lointaine et inconnue, nourrit un rêve dont elle est le miroir, une sorte d’Eden qui associe la symbolique de l’île à une philosophie de l’ailleurs. L’île est l’autre, l’ailleurs. L’île stimule l’imaginaire, c’est le lieu ultime de soi l’island en anglais : le I, land dit la psychanalyste Martine Estrade. L’inquiétante étrangeté de soi ?
(toute référence à des textes présents sur le Net et ailleurs sera parfaitement assumée)

Mythanalyse de l’insularité

Colloque international en Sciences Humaines et Sociales

21-22 mai 2018

 

21 mai 2018 – 09h00 18h00

Bibliothèques Réunies « Civique et A. Ursino Recupero » – Pétit Réfectoire – – Via Biblioteca n. 13 Catania

Monastère Bénédictin de Saint Nicolò l’Arène

 

22 mai 2018 – 09h00 19h00

Chœur de Nuit – Monastère des Bénédictins – Piazza Dante Alighieri n. 32 Catania

Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania

 

Colloque international organisé par

M@GM@ Revue internationale en sciences humaines et sociales – Osservatorio dei Processi Comunicativi, Association Culturelle Scientifique

Société Internationale de Mythanalyse, Montréal (Québec)

Thrinakìa, Prix international d’écritures autobiographiques, biographiques et poétiques dédiées à la Sicile – OdV Le Stelle in Tasca

 

Avec le parrainage de l’Université des Études de Catania

 

En collaboration avec

Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania

Assessorat pour la Culture de la ville de Catania

Bibliothèques Réunies « Civique et A. Ursino Recupero »

Institut Français de Palermo

Alliance Française de la ville de Catania

Lycée Artistique d’État Emilio Greco, Catania

 

Argumentaire synthétique

Le colloque est centré sur le thème de l’insularité. Il se propose de dresser un état des recherches et des travaux récents, de questionner l’insularité entre mythe et imaginaire et dégager des nouvelles perspectives d’études autour d’une mythanalyse de l’île. Le colloque est associé au prix international Thrinakìa, centré sur la mémoire, le patrimoine culturel immatériel de la mémoire et de l’imaginaire de la Sicile.

 

Programme PRéPARATOIRE du colloque

 

Première journée du colloque Mythanalyse de l’insularité

Lundi 21 mai 2018

09h00 – 18h00

Bibliothèques Réunies « Civique et A. Ursino Recupero » – Pétit Réfectoire – – Via Biblioteca n. 13 Catania

Monastère Bénédictin de Saint Nicolò l’Arène

 

09h00 Accueil et inscription des participants

 

09h30 Salutations institutionnelles

 

Orazio Licandro

Assesseur pour la Culture de la Ville de Catania

 

Marina Paino

Directrice du Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania

 

Rita Angela Carbonaro

Directrice Bibliothèques Réunies « Civique et A. Ursino Recupero »

 

Valérie Le Galcher Baron

Attachée de coopération pour le français Sicile et Calabre, Institut français Palermo – Ambassade de France en Italie

 

Chiara La Russa Sudano

Présidente de l’Alliance Française de la ville de Catania

 

10h00 Introduction et modération du colloque

 

Mythanalyse de l’île

 

Hervé Fischer

Président de la Société Internationale de Mythanalyse, directeur de l’Observatoire international du numérique – Université du Québec à Montréal

 

Orazio Maria Valastro

Sociologue et chercheur indépendant, directeur scientifique de M@gm@ – Revue internationale en sciences humaines et sociales, docteur de recherche en Sociologie, Université Paul Valéry Montpellier III

 

11h00 Séance de la matinée : Aventures mythiques

 

Quelques mythes siciliens dans les Métamorphoses d’Ovide : Cérès et Proserpine, Cyané, Alphée et Aréthuse

Rosalba Galvagno

Professeure asssociée de Critique littéraire et littératures comparées, Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania

 

L’île du désir, de la mémoire et du nostos : de la Sicile d’Ovide à celle de Vincenzo Consolo

Dario Stazzone

Enseigne au Département de Sciences Humanistes, Université des Études de Catania, président du comité de la ville de Catania de la Société Dante Alighieri

 

Les archétypes de l’insularité pour l’identité du territoire et des villes

Carlo Truppi

Architecte, professeur ordinaire de Conception environnementale, président de la Faculté d’Architecture de l’Université des des Études de Catania (Siracusa), directeur du Département Analyses Représentation et Projet dans les Aires de la Méditerranée

 

Les images de l’île verte : l’île d’Ischia entre mythe et modernité

Luigi Caramiello

Professeur agrégé de sociologie de l’art et de la littérature, Département de Sciences Sociales, Université des Études de Napoli Federico II

 

En passant par la Sicile: fée Morgana, en voyage dans la méditerranée

Ana Maria Peçanha

Chercheur associé Laboratoire d’Éthique Médicale et Médecine Légale, Faculté de Médecine, Université Paris Descartes, Séminaire Franco Brésilien

 

12h30 Les mythes et l’imaginaire de l’île dans la création artistique

Présentation Exposition à thème « Insularité par images », réalisée par les étudiants du Lycée Artistique d’État Emilio Greco (Catania)

 

Modérateurs

 

Maria Rosa Jijón

Artiste, responsable secrétariat culturel de l’Organisation internationale italo-latine-américaine

 

Luc Dellisse

Écrivain et poète, professeur de scénario du cinéma à la Sorbonne et à l’École supérieure de réalisation audiovisuelle (Esra), ainsi qu’à l’Université libre de Bruxelles (ULB)

 

13h00 Pause déjeuner

 

15h00 – 18h00 Remise des prix de la 4ème édition de Thrinakìa



DEMAIN, QUELLES REGLES DU JEU ? PROSPECTIVE DES DIVERTISSEMENTS Un article collectif du Comptoir Prospectiviste, avec les idées de Christian Gatard, de Jean-Jacques Vicensini et d’Olivier Parent, pour INfluencia. A lire aussi sur www.futurhebdo.fr
21 octobre 2017, 19 h 11 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

Prospective des divertissements

Le divertissement de demain sera spectaculaire, polémique et polysensoriel, immersif et politique. L’hypothèse est ici que le divertissement n’aura bientôt plus pour fonction d’échapper au monde mais d’y participer. De le reconstruire. Il sera le moteur des mutations en cours : éthiques, psychologiques et technologiques.
Retour en arrière
Les civilisations antiques et médiévales, nos racines, partageaient (déjà, comme aujourd’hui) deux conceptions divergentes du divertissement.
D’un côté,
Le bon divertissement, l’oisiveté dynamique
Elle était considérée comme une vertu positive dans la mesure où son but, sa vertu, était de permettre de mieux travailler. Dans une société travailleuse, y compris au plus haut niveau de l’état, il fallait nécessairement s’accorder des moments de détente, une certaine oisiveté (l’otium de Cicéron). Christine de Pizan raconte en 1404 dans Le Livre des fais et bonnes meurs du sage Roy Charles V comment ce dernier se levait à 5h, travaillait de 6 à 11 puis se permettait une saine oisiveté c’est-à-dire de retrouver quelques théologiens discuter de la Genèse dans son royal jardin. Trop cool.
ll y avait donc une morale du divertissement.
Bref se divertir pour mieux travailler. Gloire du travail.
De l’autre,
le mauvais divertissement, l’oisiveté diabolique
On connait l’antienne : l’oisiveté est la mère de tous les vices et le travail le père de toutes les vertus. Caton l’Ancien disait : « en rien faisant on apprend à mal faire » et Hésiode en rajoute : « le travail est la sentinelle de la vertu ».
Dans les traditions populaires allemandes, italiennes, scandinaves, on appelle l’oisiveté l’oreiller du diable : si on occupe son cerveau et son corps on évite de sombrer dans les péchés capitaux.
Le divertissement selon Pascal s’inscrit dans cette perspective : l’homme se protège du désespoir et de l’appel du divin dans le jeu social sous toutes ses formes. Le divertissement selon Debord, également, pour qui nous ne sommes que des pantins manipulés que le spectacle de la consommation abrutit.
En somme se divertir est un danger existentiel,
Nouvelle donne.
Quel est l’avenir de cette tension ? Elle semble résolue par l’affirmation d’une force qu’ignoraient les civilisations passées : l’industrie du divertissement que l’on soupçonne de vouloir dissoudre les valeurs travail et de mettre l’acceptation tragique de la condition humaine au second plan pour faire un triomphe permanent au divertissement.
Elle a un boulevard devant elle:
Le travail est considéré comme un homme malade à qui il faut injecter du bien-être, du bonheur, de la santé pour qu’il conserve un minimum d’efficacité. On cherche à faire oublier son étymologie que l’on soupçonne d’être le tripalium instrument de torture. L’approche actuelle du travail tend à le dédramatiser et à terme à le faire oublier. Mais pas en faisant croire qu’il a disparu… en constatant bientôt sa disparition réelle, effective et définitive.
Il se dit que les robots vont remplacer le travail humain et que l’intelligence artificielle va radicalement transformer le marché de l’emploi si ce n’est menacer son existence même.
On entend çà et là imaginer une organisation sociale qui procurerait un revenu universel, avec la connotation plus ou moins explicite que le travail d’autrefois n’a plus sa place au 21ème siècle.
Bref on envisage une société qui va inverser les valeurs qui l’ont construite.
De fait on va passer de la société du spectacle au spectaculaire de la société hypnotique.
On va assister à la fin du divertissement ponctuel qui agrémente le travail pour voir émerger un divertissement permanent qui occupera l’espace et le temps du labeur qui aura disparu.Certes pour la majorité des gens, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas rois ou ne travaillent pas dans la Silicon Valley ni dans la station F, le travail sert encore à financer les loisirs, à donner accès au divertissement.
A l’horizon rêvé du futur va-t-on arrêter de faire du travail le carburant de la société. On pressent que c’est crédible. Du boulot faisons table rase.
Le divertissement ne sera plus un spectacle que l’on tient à distance mais une expérience que l’on vivra de l’intérieur. Il n’y aura plus de différence entre Netflix et les medias d’information. Entre les œuvres de fiction et le spectacle en direct de la vie quotidienne ( ses drames, ses massacres, ses émotions…) la frontière sera floutée. L’ensemble des informations qui parviendront à notre conscience sera traitée comme un spectacle pyrotechnique interactif. On va basculer des gradins vers la scène. On va se mêler aux acteurs et on ne saura plus distinguer entre le réel ou le fictionnel.
Le divertissement va cesser d’être un spectacle que l’on regarde. Ce sera un évènement qui vous regarde et vous aspire.
L’information est déjà et sera toujours davantage largement mise en scène pour être le plus spectaculaire possible, c’est-à-dire la plus envoutante, sidérante et hypnotique possible.
Quand tout sera spectacle.
Les caractéristiques du spectacle, de la mise en scène ont déjà débarqué sur les plages du temps libre. Ce n’est qu’une tête de pont. Qu’est-ce qui se prépare dans les coulisses ? Quels ingrédients sont convoqués ? Quels indices encore à peine déchiffrables vont faire exploser leurs évidences ? Tout se met en place pour que le divertissement pousse le réel vers la sortie…
Les divertissements célibataires
Comme leurs noms l’indiquent ils concernent l’individu et lui tout seul.
Le divertissement et l’hypnose
Du fanatisme à la folie meurtrière, c’est la réémergence du théâtre de la cruauté par imitation.
Les médias, le regard rivé sur l’audimat – le voyeurisme, souvent inconscient, du public faisant le reste –, créent ainsi des vocations meurtrières par simple contagion . Ceci n’est que la partie immergée. De même que les héros romantiques servaient de modèles à la jeunesse du temps (aboutissant à des épidémies de suicides à chaque réédition de Werther), de même les effets de sidération des posts sur YouTube, des clips sur les médias sociaux créent des effets d’imitation qui poussent les uns à s’attaquer au sabre à Buckingham Palace et les autres à louer des gros camions blancs.
Les divertissements candides des salles de music-hall, des samedi soir à la télé, ne vont pas tarder d’être imprégné de la substance vénéneuse des attentats et faits divers sordides qui suscite l’ émotion collective surmédiatisée qui prépare à ces passages à l’acte.
Le divertissement et le vertige
Ce qui compte c’est d’avoir des expériences extraordinaires, des sensations comme jamais… et de pouvoir les raconter. Pour le moment les Brutal Tours qui baladent les touristes riches et intrépides sur les zones de combat restent plutôt confidentiels. Pas simplement parce qu’ils sont illégaux mais parce qu’on ne revient pas toujours d’un week-end à Mossoul. Bientôt ces touristes en mal de sensations fortes seront-ils embedded dans les milices? Le tourisme de guerre sera l’expérience ultime du spectacle.
Le divertissement et le simulacre
Le corps tel qu’on l’a connu est en voie de disparition. Le divertissement numérique fait déjà la part belle au simulacre : le toucher, l’acoustique, l’optique, tous les retours sensoriels qui fondent notre rapport à la matière telle que nous la connaissons sont convoqués. Sa logique prochaine est le triomphe annoncé des robots sexuels avec dispositifs haptiques sophistiqués.
Les jeux video vont proposer la reconstruction d’une réalité centripète, uniquement centrée sur soi, oublieuse de l’autre, de tous les autres. Les jeux video réduisent la distance psychologique et physique entre l’individu et le media, les casques haptiques ne sont qu’une étape, bientôt la reconstruction de la réalité sera totalement immersive. Avec la projection de l’image directement sur la cornée le virtuel sera le réel. L’écran va disparaitre. Mais ce qui va réapparaitre c’est la nécessité de jouer avec les autres qui ont eux aussi basculé dans cette virtualité.
D’où
Les divertissements grégaires
Ils seront communautaires, fusionnels.
Le divertissement et le maquillage
La mise en scène de soi dans les réseaux sociaux sera de plus en plus spectaculaire, ostentatoire, factice sans doute mais l’écrire est un jugement de valeurs qui ne sera sans doute pas pertinent. Mais les tatouages, les piercings revendiqués comme une manifestation de l’individu sont en fait une manifestation de groupe, tribale, qui permet la reconnaissance d’une appartenance à un clan.
Le divertissement et la vie en groupe… en troupe (de théâtre)
Ces groupes vivent en troupe. On va passer du divertissement nombriliste au divertissement communautaire. C’est la mise en spectacle de cette communauté qui donne envie d’en faire partie, to be part of it . Dans cette logique, la participation à la vie de la cité par des pétitions spectaculaires ( par exemple, faire de Trump le roi couronné de Mar a Logo ) relève-t-elle déjà du divertissement ? C’est une « info action » divertissante au sens premier c’est-à-dire qui fait prendre un autre chemin (que celui des problèmes essentiels). Encore que…
Pour ne pas sombrer dans une vision apocalyptique de notre avenir proche il faut comme disait Camus imaginer Sisyphe heureux :
Le divertissement et l’élévation spirituelle
A côté de l’horreur, surgiront des petites oasis de bonheurs : l’envahissement des pratiques d’apaisement et de développement personnel en vue de l’obtention de la sagesse de l’âme et du corps trouveront leur point G dans l’hyper théâtralisation des discours des grands gurus du temps : retour des ashrams de Yoga Sivananda et des stages Zen en Ardèche.
Le divertissement et l’élévation de l’expertise technique, savante et intellectuelle
Profiter de chaque instant pour apprendre et progresser en connaissance et en sagesse. On commence par soi et ça fait progresser l’humanité. Les MOOC en hologramme préparent le terrain.
Le divertissement ultime est le spectacle (de la fin) du monde
Deux forces sont à l’œuvre et vont définir les scenarios: un divertissement centripète, narcissique, nombriliste dont chacun est l’unique spectateur et acteur et un divertissement centrifuge, fusionnel, collaboratif que chaque groupe culturel (chaque tribu) va organiser.
Quant à la confusion programmée entre divertissement et information, d’une façon un peu superficielle on dira qu’elle l’a été pour des raisons d’audimat. En fait il s’agissait de répondre à l’évolution ontologique vers toujours plus de sidération pour se préparer à la sidération ultime du Retour du Messie qui sera à la fois une expérience personnelle et une expérience collective.

Nan… on blague !!! Vous savez bien que la prospective est une expérience de la pensée…

Le collectif du COMPTOIR PROSPECTIVISTE
(Christian Gatard, Olivier Parent, Jean-Jacques Vincensini)



Femmes urbaines ayant lu des livres et sachant mener conversations cherchent solutions de survie à l’échelle du prochain millénaire. C’est planétaire. C’est jouable. Enquête mythographique.
3 juillet 2017, 7 h 30 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

 

On a 20 ans à Shanghai, 30 à Mexico. Et vice versa. Idem à New York et Abidjan. Partout sur la planète. On a quoi comme (ré)solutions ? Comme pratiques d’existences – avec les (dés)espoirs qui vont avec ?  A quoi carburent les imaginaires ?

Je pars sur le terrain coacher une équipe de consultants anglais qui veulent des réponses à ces questions. Ils paient le voyage, c’est de bonne guerre. Avec ma bonne mine de sociologue prospectiviste un peu décalé, mes cheveux qui blanchissent, et la bonne humeur d’un curieux, pas dupe d’une littérature verbeuse et foisonnante sur « les jeunes » je leur sers de guide – c’est ma couverture officielle la recherche de l’implicite sous l’explicite, du non-dit sous le dit… bref le côté classique d’une enquête classique.

En fait l’aventure est à double fond. En sous-main je mène une mission secrète : poursuivre mon travail de recherche sur les « mythologies du futur », repérer où et comment les « grands récits » du siècle qui vient prennent rendez-vous avec l’avenir. Mythographier le réel. Avec un parti-pris : les jeunes femmes – l’hypothèse était qu’elles représentent un profil en avance de phase.

Dans les deux cas il faut une langue commune, l’anglais fait l’affaire. Avec un biais assumé : ceux qui maitrisent cette langue ont (souvent) un niveau d’éducation et de culture qui favorise l’échange. Il faut sortir du village pour parler étranger.  L’anglais n’est pas une allégeance, c’est un outil, un véhicule, un passeport au moins virtuel. C’est la lingua franca nécessaire pour communiquer sans interprète.

Ce furent des jeunes femmes cultivées, ouvertes sur le monde, souvent déjà ou bientôt dans des professions créatives: design, art, culture, études un peu poussées… et aussi dans le commerce et l’industrie: hôtesse de l’air, vendeuse dans le luxe, commerciales, ingénieurs IT… toutes en construction d’eux-mêmes, de leurs métiers, de leurs territoires. Toutes actrices de leur propre vie. Des femmes qui ne veulent pas s’en laisser conter. Pour les rencontrer j’ai organisé des bootcamps – des conversations pendant des journées d’immersion, d’échanges pour témoigner de qui on est, de qui on veut être.

Le récit du siècle qui vient, elles veulent l’écrire. Elles savent qu’elles se fraient leur chemin dans un monde hostile. Elles ne sont pas dupes, elles non plus. Elles savent qu’écrire leurs histoires ne veut pas dire balayer le passé. Elles s’en imprègnent. Bien plus qu’on ne croit.

Une enquête mythographique, c’est quoi ?

Il y a bien sûr une plongée dans le réel, les rencontres et les conversations, les observations. On s’assied sur une terrasse devant la Moskova, on regarde la mer grise et sombre devant Mumbai, à Shanghai on voit à peine le Yang-Tsé-Kiang intimidé par les tours futuristes de Pudong. Mais on n’est pas là pour faire du tourisme. On est là pour écouter, pour poser deux ou trois questions et laisser se dérouler la conversation.

Et il y a ce qu’on essaie de repérer, en surplomb : comment les récits qui se déroulent ici et maintenant s’articulent (éventuellement) autour des mythologies plus anciennes qui ont pu forger ces mêmes discours. On essaie de voir d’où vient qu’on est comme on est.

Un tour du monde n’épuise pas le sujet mais ça aide à y voir clair.

 

De quoi parle cette femme-monde en devenir ?

 

Elle parle de nostalgie des origines

Les jeunes filles de Djeddah, dont les voiles noires cachent en début de journée des ensembles Gucci qui peu à peu se laissent voir, m’interpellent: nous sommes bédouines! disent-elles. Je m’étonne encore que les autorités locales qu’on sait sourcilleuses m’aient laissé tranquille et seul avec elles toute cette journée. Elles rient aux éclats de cette liberté qui leur est donnée de parler librement, avec un occidental inconnu, des campements dans le désert. Elles s’en revendiquent les héritières et les dates et le miel incarnent – disent elles sans sourciller – l’idée du bonheur. Demain, dans leur avion vers Londres, elles vont monter la passerelle, hijabs au vent.  A peine installées dans le confort de la classe affaire elles vont le faire disparaître au fond de leurs sacs pour sortir les tenues girly les plus branchées de leur double vie londonienne.

Le soir je suis allé́ boire le thé et fumer le narguilé́ sucré sur la place publique. Les seules femmes présentes – voilées niqab – étaient les mendiantes et, devant moi, les lampions éclairaient la place des exécutions publiques.  Les imaginaires et le réel clachent sec à Jeddah.

A Mexico, on se clame fièrement Aztéques! On évoque les breuvages bio des ancêtres.  Aguas Frescas et Acqui de Horchata symbolisent ces nostalgies. Monica arbore fièrement un tatouage de la déesse aztèque Xochiquetzal, la déesse de l’amour et de la beauté́, protectrice des artisans, des prostituées et des femmes enceintes. Elle se considère « connectée à Dieu et à la plus importante force de l’univers, l’amour ». Les mythologies des grands anciens inspirent la thèse qu’elle écrit sur « l’éveil universel de la conscience ». Elle croit profondément à « un nouvel âge de l’humanité́ » une fois que « la crise de la modernité́ sera dépassée ». Elle pose l’hypothèse que « l’Amérique Latine va contribuer à retrouver les sagesses antiques ». Elle évoque sa communauté́ d’amis à Mexico qui partage ses convictions. Elle vient d’avoir une petite fille et cette expérience participe de ses convictions. Une idéologie post-new-age envahit la planète.

Ces passés lointains me semblent bien idéalisés. N’y aurait-il pas un peu de naïveté dans l’air ?  Ce n’est pas de ça qu’il s’agit. Le sable brulant du désert, le couteau sacrificiel des Aztèques ne devaient pas être des parties de plaisir mais vous avez entendu parler d’euphémisation? C’est vieux comme le monde. Les épisodes de violences antiques, de temps difficiles et rugueux sont transformés peu à peu, modifiés, adoucis dans la mémoire et la pratique collective. Du sacrifice humain vers le sacrifice animal puis vers le symbole du sacrifice, ça calme.

C’est que partout ces jeunes femmes cherchent à se réapproprier leur histoire commune, à remonter le temps, à revitaliser des racines sans avoir peur des clichés – cela n’est pas frileux, ringard ou rétrograde. C’était une inscription joyeuse dans le temps long de l’histoire.

 

Pendant qu’elles vitupèrent contre le traitement fait aux Pussy Riots les jeunes Russes convoquent avec force clins d’oeil amusés les babouchkas d’avant les Soviets à Moscou. Ce culte de la grand-mère ressemble à s’y méprendre avec celui de la déesse mère – il importe peu que les figures ancestrales de la féminité aient dominé ou non en des temps antiques plus ou moins mythiques. Ce qui compte aujourd’hui c’est que ces figures soient convoquées pour un job tout à fait nouveau. Les divinités féminines se retroussent les manches et se mettent au boulot.

 

Elle parle de double appartenance

Si les jeunes londoniennes ont fêté le Jubilé d’Elizabeth avec la même fierté qu’elles le firent pour Victoria un siècle auparavant, elles ont fait aussi un triomphe aux Jeux Olympiques. L’image est saisissante : on appartient à une histoire ancienne et puissante qui continue de créer du vivre ensemble local et cela cohabite avec l’accueil enthousiaste de la mondialisation sportive: globale.

Partout s’exprime une passion profonde pour sa ville (peut-être plus même qu’à son pays) qui fait de chacune une sorte de cité-royaume, un bassin de vie et de culture sorti d’un conte moderne, une cité qui fait office d’aimant – office d’amant – qui fera toujours revenir à elle. Le retour à la ville natale est vécu comme une loi de nature.  Là d’où je viens est un haut-lieu quasi mystique, profondément aimé, contesté aussi, challengé toujours, qui est le centre de leur monde.  L’équipe de foot comme totem.

Et à côté de cet enracinement dynamique[1] , s’exprime un puissant sentiment d’appartenance au monde car voyager et découvrir le monde entier fait partie de l’initiation nécessaire, attendue, souvent réalisée, toujours rêvée. Le voyage immobile que permettent les tablettes, les smartphones, les consoles qu’elles possèdent tous, ne suffit pas. Il faut sentir, toucher, s’imprégner du monde réel… Il faut aussi pouvoir le revendiquer – connaître le monde, raconter ses voyages, est un argument de vente de soi dans toute activité contemporaine qu’elle soit alimentaire ou affective : la recherche d’un job, d’un ami FaceBook…

Leur rapport aux nouvelles technologies est plus stratégique qu’émotionnel – c’est leur efficacité qui compte. Elles sont à leur service : les nouveaux esclaves digitaux  ont intérêt à bien se tenir… même si parfois, ça et là, apparaît une fatigue du high tech et un besoin chuchoté de retrouver vérité et simplicité. En tout cas cela pourrait devenir assez chic de le prétendre… quant à se débarrasser de son Iphone ou de son Androïd… personne ne l’envisage vraiment. Ce sont des instruments de lien. Le soi-disant enfermement numérique qui les éloignerait du monde réel pour en faire des zombies digitaux ? Non. Ca, c’est le regard des anciennes générations. La jeunesse-monde chevauche les écrans comme le shaman son tambour.

 

Elle parle de culte du groupe, de la tribu. Se retrouver ensemble pour une journée était un formidable stimulant émotionnel et mental.  Le fait d’être en groupe correspond profondément à ce qu’elles sont, à ce qu’elles aiment, à la façon dont elles fonctionnent… Pas question pour autant d’exclure les hommes. Certains se joignaient à nos conversations. Pas de discrimination. L’expérience du groupe consolide l’indépendance, l’esprit pratique, la mobilité, la volonté de se prendre en main – avec le sentiment d’appartenir à la communauté internationale de la jeunesse. Fascinante stimulation aussi bien locale et globale.

 

De quoi cette jeunesse-monde est-elle le nom ?

 

D’un incroyable enthousiasme qui contredit toutes les trompettes du pessimisme qui résonnent du côté de chez nous. Une foi en l’avenir, même chez Poutine, même chez les Mollahs, une façon de rebondir avec fierté sur les Jeux Olympiques à Londres, l’Expo Universelle à Shanghai, l’éternel et toujours très contemporain carrefour du monde qu’est Istanbul.

Cette jeunesse-femme-monde est aussi pleine d’une ironie souveraine et mordante devant les adultes qui se prennent pour les maîtres de la planète – là encore (et avec un humour pas toujours prudent me disais-je parfois ) aussi bien à Djeddah qu’à Moscou ou Shanghai. J’aurai pu imaginer qu’on s’inquiète, histoire de se faire un peu peur, que les puissances locales s’intéressent à ces évènements minuscules qu’étaient ces bootcamps : les barbus à Djeddah, la police de Poutine à Moscou, le Parti à Shanghai, quelques intégristes à Istanbul, voire les mafieux de Mexico… Ces forces obscures flairent le danger mais elles ne peuvent pas comprendre ce qui se déroulait dans les bootcamps. Moi-même je n’en suis pas certain. Etaient-ce les grandes manœuvres secrètes de jeunes filles s’apprêtant à prendre les rênes du monde, nouvelles amazones n’ayant peur de rien. Les émeutes de la Place Tahrir au Caire ou de la Place Taksim à Istanbul allaient ouvrir le bal. Après la Place Tien An Men. Ou, plus qu’une récrimination contre la rigidité de leur société, était-ce plutôt une façon maligne et complice de jouer avec les codes, le triomphe de l’ironie, oui, comme seule réponse efficace que concoctent ces sourires enthousiastes, rapides et furtifs …

 

A Shanghai, Shin-Lin me propose de visiter le quartier des artistes d’avant-garde de MoganShanLu. Dans la Galerie Island 6, je suis invité à téléphoner à un numéro qui s’inscrit au dessus d’un tableau[2][3] qui semble être un hologramme – une femme dans une cage, une belle femme sexy dans sa robe rouge, le visage inquiet, regarde vers le ciel. Rien ne bouge. Je compose le numéro et tout à coup l’image s’anime. Des flammes entourent alors la femme, elle pousse des cris, elle cherche à s’enfuir en escaladant les barreaux de la cage. Je laisser sonner trois ou quatre fois. Je me dis que ça suffit comme ça, que cela doit être la règle du jeu, que de laisser sonner davantage va me faire accuser de sadisme, que sais-je ?…. je raccroche. Et dans la seconde qui suit, le tableau me renvoie un texto en anglais et en mandarin : that wasn’t enough to set me aflame !!!! Traduction possible : il m’en faut plus pour m’exciter.

A Casablanca, sous les murs du Rick’s café et les regards croisés de Bergman et Bogart,  Majda m’interpelle sur les symbolismes de l’oxymore qu’elle étend à sa vision d’un monde qu’elle veut surplomber. La Vieille Medina nous nargue sur les murailles de laquelle elle veut danser en défiant les ombres d’en bas. Les légendes s’empilent. Brillante, vitupérante, la jeune étudiante semble en permanence braver les interdits – et pas seulement ceux qui semblent recouvrir le monde musulman. Ce qui la fascine dans cette figure de style c’est sa capacité à surprendre sans cesse, à proposer des contradictions fertiles.

D’Istanbul Neslihan m’envoie des textes qui sont des concentrés de souffre pur. Pendant que la ville brûle et que Daesh mitraille, l’adolescente fourbit ses armes : ses  rendez-vous avec le futur vont être décapants.

Cette génération est impolie. Elle nous prépare quelque chose. Elle est en embuscade. Elle ne va pas nous lâcher. Car en même temps elle est agent double. Elle puise à tous les râteliers. Leur idéalisme politique ou spirituel ne les empêche pas d’avoir des principes de réalité bien ancrés… et des ruses dignes d’Ulysse. Leur cheval de bois dans la ville de Troie n’est plus la sculpture monumentale que raconte Homère.  C’est la mise en spectacle de leurs transes shamaniques – version triple shots de vodka et binge drinking si besoin, leur esprit de fête, la mise en scène d’un besoin de partage, de sensations et, entêté́, universel, d’un besoin d’authenticité́, de naturel.

J’ai vu – partout – ce retour aux origines, ce culte des ancêtres revu et corrigé pour le siècle qui vient. Sous des dehors ingénus, voire candides cela nous prépare une belle empoignade. L’exaltation, la créativité ne seront plus un spectacle auquel nous croyons assister. Ce sera leur ruse ultime. De ce cheval de Troie descendront les nouvelles Lilith, première femme d’Adam que l’on a traité autrefois de maléfique, accusée d’être le serpent provoquant la chute d’Eve, d’avoir été la Reine de Saba, la tentatrice. Créatives, impertinentes et facétieuses, elles vont changer les règles du jeu. Les masques vont tomber. Et les traits de la sorcière morpher en fée. Barbus intégristes, apparatchiks corrompus d’un côté, politiciens normaux de l’autre n’ont qu’à bien se tenir.

Vous n’y croyez pas ?

Vous pensez que tout  ceci est du wishful thinking, des vœux pieu, une incantation. Vous vous dites que les barbus ont des kalachnikov et tirent à vue, que les apparatchiks des comptes en banque et les clés du coffre.

Patience. Il y a un récit auquel on n’échappera pas et qui sera peut-être la signature mythique de ce début de siècle:  l’allégeance rebelle.

C’est l’idée qu’il faut bien faire allégeance à un certain nombre de choses: la planète qu’il faut protéger ; les estomacs qu’il faut remplir ; la technologie qui n’en fait qu’à sa tête; le monde qui est cruel et injuste … Cette génération a mieux à faire que s’indigner. Elle va introduire, à l’intérieur du système, des interférences, des courts-circuits et autres facéties créatives. Ma conviction est que ces femmes vont prendre de l’avance sur le futur en rejetant les conventions, en apportant à leur environnement une énergie inspirée par les meilleures pratiques du monde contemporain, par les expérimentations sociétales réussies où que ce soit dans le monde. Cette génération est là pour inspirer, impulser, tenter des coups, jeter les dés…on n’anticipe pas le futur, on le crée ! Face aux fractures de plus en plus béantes et à la barbarie que les médias mettent en scène, elle va créer des sutures qui seront des sources d’inspirations …

 

 

 

 

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Christian Gatard a publié une douzaine de livres, romans, récits et essais.  Sociologue, prospectiviste, entrepreneur dans le domaine des sciences humaines, il parcourt le monde en permanence.

 

 

Ses études de littérature anglaise et de sociologie s’enrichissent dès le départ d’expériences diverses. L’année 1969 est consacrée à Steve McQueen qu’il accompagne en tant qu’interprète sur un film. En 1971, lecteur de français en Corée du Sud, il rentre en délicatesse avec l’Ambassadeur de France après un dîner où leurs conceptions de l’ésotérisme élisabéthain ne concordent pas.

De retour en France il traduit des essais de psychanalyse qui paraissent chez Calmann Levy. Il crée bientôt avec quelques amis, en parallèle avec son Institut, dans un loft sur le Canal St Martin, « Au Lieu d’Images » un garage à musiques, théâtres et arts plastiques. Il monte des installations sur l’imaginaire des objets aratoires, puis sur les bêtes à cornes.

Profitant de nombreuses missions d’études en Asie, il visite Bornéo à de nombreuses reprises, de 1980 à 1995. Il invente la réactique transculturelle, une confrontation des objets de la consommation occidentale avec les tribus primitives de Bornéo. Il raconte ces aventures dans Bureau d’Etudes, récit autobiographique, paru en 2008, aux Impressions Nouvelles.

En 1999 il publie L’Ile du Serpent-Coq, un roman également inspiré de ses périples au Sarawak et au Kalimantan.  De Conchita Watson le ciel était sans nouvelles  parait en 2001, et en 2003, En respectant le chemin des Dragons. Ces trois romans se réfèrent au réalisme fantastique.

Le Peuple des Têtes Coupées, un essai sur les mascarons, paraît en 2005 chez Coprah et Nos 20 prochaines années, essai de prospective buissonnière, est publié en 2009 chez Archipel. En 2010 il contribue au Dictionnaire de la Mort chez Larousse et Jean Daniel Belfond, fondateur des Editions l’Archipel, lui confie la collection Géographie du Futur. En 2012,  il participe aux livres collectifs Manuel Social Media Marketing, Comprendre les Réseaux Sociaux !  et  Clés de la Mutation. Mythologies du Futur, son nouvel essai de prospective, est publié en 2014. Rupture vous avez disrupture (2015) et Chroniques de l’Intimité connectée (2016), deux essais collectifs du think tank Les Mardis du Luxembourg sont publiés aux éditions Kawa. Il vient de recevoir le prix Trinakria 2016 décerné par la ville de Catania pour son récit Archéologie d’un futur sicilien.

 

[1] Comme dirait Michel Maffesoli pour souligner que le passé, l’enracinement est porteur d’une énergie constructive

[2]  le voyage a commencé par Londres, New York, Mexico, Bombay, Shanghai, Moscou, Istanbul, Djeddah, puis Lomé, Abidjan et Bouaké, Casablanca, il s’est poursuivi par des échanges par mail.

[3] de Liu Diao



Archéologie d’un futur sicilien
28 décembre 2016, 7 h 32 mi
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(mise en page en gestation – Prix Trinakia)
Précis de nissonologie contemporaine
SIX ILES
1. Incipit.
J’avance avec prudence dans le texte qui s’écrit ici et il serait judicieux que le lecteur en fasse autant. Nous pouvons donc progresser ensemble mais je vous préviens : sur mon compteur Geiger de la mesure de radioactivité mythologique l’aiguille s’affole. Il y a risque de contamination.
2. En route.
Le vent, le vento dil stretto, pousse notre embarcation dans le Détroit de Messine. C’est ici que commence le voyage. Ce vent, les navigateurs en connaissent la traîtrise. Je jette un œil sur les mesures que me fait parvenir l’appareil. Elles laissent peu de doutes : le passage de la Calabre à la Sicile conduit également de la grotte de Scylla au gouffre de Charybde. Le cliché
mythologique est un peu gros mais il est trop tard pour revenir en arrière. Les flots du Détroit nous emportent. Est-ce la faute à notre appétit insatiable de sensations fortes ? Le monstre marin, fille de Poséidon et Gaïa, nous a-t-il déjà avalés ? Pourtant ce texte est encore glabre. Voyez : à peine plus dix lignes et déjà la mythologie avec ses gros sabots ! Et ce n’est pas fini. Car voilà que je me penche sur la Sicile comme sur la carte d’une chasse au trésor. Sicile de fiction, peut-être. Des signes, des figures, des intersignes. Au nord, vers la côte de la Mer Tyrrhénienne, le dessin maladroit d’une
tête de mort. Ici une bâtisse écroulée, graffitis aux murs et façade affalée. Au sud, du côté de la Mer Ionienne, un navire à peine ébauché, on distingue sur sa proue le dessin caricatural d’un monstre marin.
Sur le simili parchemin des flèches indiquent un cheminement. Cette carte c’est aussi un poncif. On dit beaucoup de mal des poncifs, c’est très injuste. Certes ce sont des lieux communs, mais au moins ce sont des lieux où les repères sont
clairs et rassurants. Ils sont communs, partagés. Gros avantage: ils sont consensuels. Les mythes sont peut-être à la mode pour des raisons de ce type. On s’y retrouve. Et disant cela je ne dévalorise pas la mythologie…on va voir que bien au contraire je tente de la moderniser, voire de lui faire prendre de l’avance. Mais chaque chose en son temps, ce qui est sans doute le comble de la futurologie.
Cette carte, bien entendu, je l’imagine à ma main. Peut-être est-elle la trace à garder de ce récit : une esquisse de parcours qui va nous permettre de repérer des cachettes qui seront mises à jour lors d’un prochain voyage. Celui que nous entamons est la phase préparatoire d’un périple au terme duquel nous pourrions ne plus être ensemble. Ce texte et sa lecture seraient alors un rite de passage, celui de l’enfance à l’âge adulte. Le dessin maladroit, enfantin, me va, de fait, très bien. Enfantin oui, enfance du voyage. Devenu grand il faudra qu’il se coltine le vrai monde. Celui où il faut se débrouiller seul. Alors prenons cette carte pour un tâtonnement malicieux avant le grand plongeon. Celle que je reproduis ici, trouvée dans les malles de Google, fait l’affaire. Ce qui me donne l’occasion d’une petite digression qui servira de viatique. Le viatique, histoire d’en remettre une couche mythologique, était la pièce de monnaie qu’on mettait dans la bouche des morts pour payer à Charon leur passage sur le Styx. Nous n’en aurons pas besoin tout de suite puisque nous venons d’échapper à
Charybde. Mais la digression, la voici : souvent je m’arrête au bord de la route, je cherche une connexion. Des appli m’indiquent des pistes, des images me confirment des hypothèses. Le voyage réel se fait de conserve avec le voyage
virtuel. Je navigue dans le Net comme les corsaires dans les Caraïbes. J’arraisonne les navires marchands, je monte à l’abordage des frégates chargées de l’or des Incas, je m’empare de la mémoire de l’humanité. On peut y plonger allègrement ensemble, dans ces trésors, car nous participons de cette mémoire. C’est nous qui l’avons créé. Ce nous c’est l’ensemble de l’espèce humaine, savante ou pas, pensante ou pas, artiste ou pas, c’est l’humain et le non-humain, c’est la totalité des mondes passés, présents et à venir. Et surtout c’est moi, et c’est vous qui naviguons donc dedans, emportés par les flots numériques et les teraflops de données. Que faire de ces savoirs sinon les négocier quand nous abordons un port ? Tout texte est un port, une escale. Et cet endroit est une île. Et c’est de cela que je voulais vous entretenir avant le départ.
Dis comme ça, alors que mon récit n’a pas encore pris
forme, ça fait un peu ambitieux pour un voyage qui en est à peine encore un. Mais mon cerveau post-reptilien s’aventure avec une délicieuse sensation de vertige dans les arabesques électroniques et bientôt quantiques du susnommé jardin de la connaissance du vrai et du faux, du bien et du mal, du savant et du saltimbanque et ça lui fait bien plaisir. N’hésitez pas à faire de même avec vos existences antérieures, vos double-vies, vos rêves de grands destins. Vous verrez, c’est comme le Grand Huit. Sensations assurées.
La feuille de route de ce voyage commence à prendre cette forme tarabiscotée des souvenirs qui s’amoncellent, se croisent et se décroisent. La Sicile serait la couche la plus récente d’un palimpseste que je réécris depuis ma nuit des temps, tels ces murs d’affiches recouverts de saisons en saisons. Palimpseste moderne mais palimpseste tout de même. Je suis mon propre moine copiste et nous pouvons explorer ensemble. Verlaine nous lance dans la pente :
En route, mauvaise troupe ! Partez, mes enfants perdus ! Ces loisirs vous étaient dus : La Chimère tend sa croupe.
*
Le récit de mon périple se met en place. C’est donc la rencontre entre … vous allez rire… entre nature et culture. Nous savons désormais que cette distinction a perdu de sa pertinence. Vous ne riez peut-être pas mais je vois bien que vous souriez : encore un poncif, ce dualisme est une vieille baderne. Encore faut-il l’expérimenter. Cette histoire de nature d’un côté et culture de l’autre va se dissoudre en Sicile. Il n’y a plus d’un côté une
mythologie hors sol et de l’autre une histoire intime qui ne concernerait que nous. Il y a – accrochez-vous – une parade amoureuse entre les deux, une copulation annoncée et ce n’est pas porno. C’est juste réjouissant. C’est une chimère.
*
Je suis voyageur, cartographe, écumeur de tarmac. Ne prenez pas ça pour de la vantardise. C’était autrefois romanesque et romantique mais le voyage dans le siècle à venir va perdre de son aura. Cultiver son jardin va être bientôt à nouveau à la mode. Considérons cette compulsion antique à aller voir ailleurs, à sortir de son village, avec beaucoup d’humilité. Le monde entre dans un cycle sédentaire. Les nomades n’auront bientôt plus de territoires. Le mythe du grand voyageur va s’éteindre. Enfin, pas tout à fait car ce sont déjà d’autres formes de voyages qui se dessinent nourries par le virtuel et
les technologies ubiquitaires. Et j’y pense en même temps que vous : peut-être ce récit qui s’entame et qui nous lie en est-il un avant-goût ? N’est-ce pas ce que j’envisageais plus haut : faire corps avec la totalité des connaissances – pas toutes les connaissances, non. Juste celles qui nourrissent votre être-arbre, c’est-à-dire les racines qui plongent dans Gaïa, la terre, et s’y alimentent, lançant leurs rhizomes à des distances insoupçonnées, et les branches qui projettent vers le ciel des pompes aspirant vents et nuages – et profitant de la publicité récente que le Cloud lui fait.
Cela dit, cet être-arbre est bien le héros pseudo-sédentaire que les temps à venir vont célébrer. C’est le green man, l’homme-vert, le feuillu. Il est une image de renouveau, de renaissance. « L’Homme Vert signifie l’irrésistible vie… Il est une image issue des profondeurs de la préhistoire ; il apparaît et semble mourir puis, après un long temps d’oubli, il revint à plusieurs reprises au cours de ces derniers deux mille ans. De par ses origines, il est bien plus ancien que notre ère chrétienne.» écrit William Anderson dans un bouquin du siècle dernier acheté dans une brocante à Londres quand j’écrivais mon livre sur le Peuple des Têtes coupées. C’était il y a longtemps. Cet être-arbre qui va réapparaitre dans le folklore du futur n’était alors qu’un signal faible.
*
Ne croyez pas que je m’égare. Je fais le plein de provisions. Je nous prépare un viatique d’enfer. Ce ne sera pas du luxe.
*
Attention à la marche. Attention au passage.
Ça y est ! J’y suis. Vous êtes toujours avec moi ?
J’avais bien soupçonné voire espéré que des surprises m’attendraient. Pas qu’elles soient en embuscade à la moindre inflexion de la trajectoire.
Avais-je des idées préconçues ?
Pas tant que ça.
Je n’avais peut-être surtout aucune idée précise sur la Sicile : ni savante ni naïve. J’avais des trucs en tête mi romantique mi romanesque, à l’instar de cette idée désuète de voyage à laquelle je reste attaché viscéralement – mais il faut dire que je suis né au siècle dernier.
J’ai ouvert un fichier vierge sur mon Mac et j’ai commencé le voyage dans le Détroit. Des pans entiers de ma mythologie personnelle me sont alors tombés dessus et se sont accrochés à mon ventre comme les sangsues dans mes traversées de l’île de Bornéo qui fut au tournant du siècle dernier une des couches du palimpeste. Les sangsues ça ne fait pas très ragoutant mais ça faisait partie du voyage. Au fil des années je me suis mis à les accepter. Sangsues à Bornéo, ce pourrait être une image pseudo-épique, pas ragoutante, un peu inquiétante. Tandis que repérage de mythes familiers, ce serait plutôt une image de bonne prise – sentiment qu’on va être entre clercs de bonne compagnie. Et pourtant à part le facteur beurk, c’est du même ordre ou un même paradigme, terme plus chic. Dans les deux cas ça s’accroche et ça vous pompe le sang. Les sangsues font corps avec vous – ce n’est guère douloureux, ça se découvre furtivement. On pourrait presque dire qu’elles annoncent une proximité entre l’humain et le non-humain. Ce qui sera une bonne prise philosophique dans le siècle qui vient. Peut-être voulaient-elles me dire que nous étions frères de sang dans la forêt équatoriale. J’étais leur gourmandise, j’étais leur banquet. Les mythes familiers c’est un peu pareil. Ça vous donne le sentiment que vous appartenez à la même famille humaine, à une même culture, aux mêmes réjouissances culturelles. Nature et culture assis à la même table. Chimère, vous dis-je.
Mais de sangsues en Sicile, point.
Pourtant les rayonnements de mon détecteur s’affolent. Je vais devoir manipuler avec prudence les témoignages que je récolte sur ce voyage en Thrinakìa – l’autre nom de l’île dont je découvre l’existence et le drapeau.
N’anticipons pas.
Témoignages donc.
Il y a certes les miens : les choses que j’y ai vues.
Il y a les répliques suscitées par ces choses vues qui sont des secousses telluriques dont je ne mesurais pas toujours la magnitude sur le moment. L’énergie qu’elles libéraient, je pouvais en avoir la préscience, l’intuition qu’il y avait là matière à émotion. Je n’en cernais pas les conséquences.
Il y a les personnages réels ou fictifs que ces séismes libéraient de prisons mémorielles car il est bien connu que lorsque la terre tremble elle peut révéler des villes englouties qui renaissent à la lumière, des ruines oubliées qui révèlent des trésors vivants, des cadavres abandonnés qui se mettent à sourire.
Le Détroit enfin traversé, le voyage commence vraiment à Catane. Il est temps parce que cela fait un moment qu’on cause et de la Sicile, on n’a pas vu grand-chose.
Catane donc.
Etonnante atmosphère.
Sous les arcades de la place qui porte désormais son nom, près
du Duomo Saint Agathe, Mazzini est attablé. Ulysse et Diodore
de Sicile sont assis en sa compagnie. Que croyez-vous qu’ils
font ? Ils dégustent des pâtes à la Norma. Le décor est un peu
sombre, les murs de Catane sont noircis par la pollution ou
peut-être par les cendres de l’Etna qui ne perd pas un mot de la
conversation. Attardons-nous sous les arcades. Voyez ces géants. Nous savons bien que nous sommes des nains juchés sur leurs épaules et que nous n’allons pas tarder à souffrir du vertige. De quoi parlent-ils ? Mazzini, figure tutélaire de l’émeute, Ulysse de la ruse, Diodore de l’exploration ethnographique discutent de la Sicile.
Les spécialistes sans promouvoir Diodore au rang de grand historien, lui reconnaissent des mérites : son ambition de composer une histoire universelle, le choix d’un plan privilégiant l’histoire récente, le souci, malheureusement épisodique, d’indiquer les sources utilisées et même une certaine qualité littéraire.
Par acquis de conscience, je cherche leurs profils sur le Net. Je ne doute pas de pouvoir trouver un jour leurs CV à la manière des LinkedIn ou autre Viadeo. Pour l’instant ces quelques lignes font l’affaire. Pas tant pour vous apprendre quelque chose sur eux que vous ne connaissiez pas mais pour bien que nous comprenions d’où ils parlent comme disait les trotskystes d’autrefois et pour m’étonner avec vous de la conclusion de leur conversation : leur ferme croyance en l’existence de la Sicile. Non pas qu’ils ne soient pas comme vous et moi en ce moment en train d’en fouler le sol et donc qu’avec un peu de bon sens on se doute bien que ce n’est pas de cette existence-là qu’il s’agit. Le révolutionnaire en haillon, le rusé aux mœurs douteuses, l’historien mal-aimé ont mis un moment pour se mettre d’accord : la Sicile était-elle ou non un concentré du monde, la préfiguration de Gaïa, déesse primordiale, divinité chtonienne – et sans doute de ce fait à son aise dans les fournaises souterraines de l’Etna – mais surtout la Gaïa de l’hypothèse de Lovelock, la Gaïa superorganisme autonome et intelligent dont la Sicile serait soit le modèle qui l’a inspiré, soit la maquette qui le reproduit ? L’hypothèse Gaïa est plutôt alarmiste dans ses scenarios de fins dernières. Nos compères finissant leurs plats de pâtes ne s’en inquiètent pas trop. Les voici:
Metternich, Premier ministre autrichien, dit de Giuseppe : « Personne ne m’a donné plus de tracas qu’un brigand italien : maigre, pâle, en haillons, mais éloquent comme la tempête, brûlant comme un apôtre, rusé comme un voleur, désinvolte comme un comédien, infatigable comme un amant, qui a pour nom : Giuseppe Mazzini ».
S’il est bien souvent considéré comme l’incarnation de l’héroïsme et de la ruse, Euripide en dresse un portrait peu flatteur, renversant les qualités habituellement admises pour en faire un homme fourbe et cruel. L’aide divine dont il bénéficie tout au long de l’Odyssée peut également mener à nuancer son caractère, tout comme la perfidie dont il fait preuve auprès d’Hécube dans l’Iliade.
Les turbulences qui agitent la Sicile, finissent-ils par conclure, s‘inscrivent dans le grand récit de l’histoire humaine qui a ses phases, ses périodes de bouderies, ses colères et ses réconciliations.
Voilà qui confirme une feuille de route alléchante.
*
Dans une rue adjacente, les adeptes d’une religion indienne sortent de leur lieu de culte. Plus loin la foule hétéroclite de l’aéroport international se presse à monter et descendre des passerelles. Le port , à deux pas, bruisse …
Catane, ville-Phoenix : le Duomo resplendit contre les pierres noires qui racontent une résurrection permanente, une énergie immarcescible – ça vient des volcans qui imposent une vigilance historique. L’île est particulièrement exposée aux tremblements. On n’est pas sans conséquence sur une zone de fortes frictions entre les plaques tectoniques africaine et eurasienne.
Ce serait la faute à Encelade un géant qu’Athéna écrasa en l’ensevelissant sous la Sicile et dont les contorsions provoquent encore les séismes en question. L’explication tient la route.
Tout comme Catane, la ville de Noto Antica a été rasée en 1693. Je la visite sous un soleil aussi ardent que les entrailles de l’île.
Construire, détruire, reconstruire, c’est à ça que jouent les Dieux et les hommes, et ils n’en ont pas marre à la fin ?
Il a fallu que ce soit en Sicile que je pose la question ?
J’aurai pourtant dû m’en douter. Les îles ont été pour moi des plaques tournantes, des lieux d’échanges, des moments de rupture/ reconstruction. Encelade grattait et gravait le palimpseste – 1. Les îles Britanniques de mon adolescence : sortir de l’enfance ; 2. Belle-île en mer devant la Bretagne et les pierres levées : guérir d’une rupture avec ce qu’il faut de magie; 3. Bornéo et les Célèbes, les îles de la Sonde : conversation avec les sangsues; 4. l’île de la Réunion : ne pas avoir visité l’île Rodrigues pour me donner l’envie d’y retourner – car il manque toujours une île plus loin; 5. Manhattan : comprendre qu’une ville est une île…ce qui est une autre histoire. Et 6. La Sicile, dernier avatar de cette séquence entamée il y a plus d’un demi-siècle. Je devine votre pensée : l’islomanie s’est emparée de l’auteur. Ce qui peut provoquer des vertiges.
*
Commençons par la fin. Disons : l’ultime voyage, histoire de nous donner des frissons. Le viatique de Charon que vous avez laissé au fond de votre poche va nous concilier notre entrée au Paradis. La mise en spectacle des crânes est une façon sans doute mélancolique de baisser le rideau sur une existence. Les têtes coupées qui m’accueillaient, pourtant hilares les unes, certes affligées les autres, dans les long houses dayaks du Sarawak me confiaient des messages destinés à leurs frères encastrés dans les ossuaires des églises chrétiennes d’Occident. Cette solidarité post-mortem entre trépassés de cultures si distinctes faisait de moi leur obligé. J’ai toujours eu une grande tendresse pour les cimetières. Ces messages transitèrent, à la toute fin du siècle dernier et sans que j’eus besoin d’en piper mot à quiconque, dans l’exposition La Mort n’en saura rien au Musée des Arts d’Afrique et d’Océanie de la Porte Dorée dans l’Est parisien. Il est aujourd’hui le Musée de l’Histoire de l’Immigration. Cette exposition mémorable, somptueuse, a été le chant du cygne du MAAO. Ce changement de registre a une logique interne que les responsables des Musées de France n’avaient sans doute pas saisie mais que les facétieux conservateurs de l’époque avaient peut-être introduite: l’exposition fit un triomphe à la migration des âmes et j’aime à penser que ce fut un clin d’œil à la migration des peuples qu’honore le nouveau musée. Solidarité entre les vivants et les morts. Les reliques triomphantes qui y furent exposées sont aujourd’hui dispersées permettant unretour chez soi de ces trésors morts. C’est là que je les retrouve.
*
Les Catacombes Capucines de Palerme diffèrent des tombes rupestres des falaises Toraja aux Célèbes en ce que les corps des capucins momifiés sont exposés et que les morts Toraja sont en effigie. Les ossements de Palerme sont plutôt récents, ceux de Rantepao plutôt anciens. Ma tendresse pour les uns comme les autres reste inchangée et cette solidarité des cadavres est réjouissante.
D’un côté de la planète comme de l’autre les touristes affluent. Je ne peux pas leur en vouloir d’être ainsi fascinés par les représentations de leurs inéluctables destins. Pourtant ces hauts lieux mythiques sont aussi victimes de leur succès : la respiration et la sueur des visiteurs à Palerme a dégradé les momies et l’afflux de touristes en Pays Toraja a mis à mal la culture locale. Même la mort triomphante a ses petites faiblesses.
En procédant ainsi à la parade funéraire de ses chers disparus la Sicile rejoint une fratrie nissonologique pour reprendre le terme proposé par Abraham Moles pour définir la science des îles. Les îles se synchronisent. Elles sont toutes les terrains de jeu des enfants éternels que nous sommes. Elles disent la même chose : que la mort est un jeu, qu’elles sont des repères de pirates et que les pirates dansent avec la camarde. Elles disent aussi qu’elles sont un concentré du monde, un cosmos en réduction et donc un lieu de lecture du monde et de son avenir. Mes trois amis sous les arcades me l’ont dit à leur manière.
*
Ce texte s’apparente derechef à un journal de voyage dans l’espace et dans le temps. J’explore la Sicile par petites touches, sans en faire trop sur la sérendipité mais en l’acceptant avec bonne grâce. Hasard et sagacité recommandés.
*
L’île d’Ortigia est le cœur battant de Syracuse. C’est une île dans l’île, une île au carré, une île sursignifiée.
Le Palazzo Bellomo est un musée charmant, magnifiquement rénové. Je le visite seul, ce qui rend encore plus dense la sensation soudaine d’être cerné par une mythologie qui m’apparaît à l’évidence conspirationniste. Je viens de dire que l’île, toute île est un concentré du monde. Ici l’effet est surmultiplié. Est-ce le syndrome d’Ortigia, sorte d’île au carré ? Est-ce la volonté secrète du conservateur ? Peut-être plus probablement est-ce la crainte du retour du Grand Pan dont on entend déjà prononcer le nom dans le venti dil stretto… Conspiration donc: tout a commencé avec cette secte de Nazareth qui a emprisonné l’imaginaire occidental. Passant d’une salle à l’autre je suis pris de panique (je ne m’étais donc pas trompé en prêtant l’oreille au vent dans le Détroit). Le story-telling chrétien s’est emparé du Palazzo, de l’île, de la planète entière depuis que Constantin, premier empereur chrétien, a trahi le monde antique et je le réalise peut-être pour la première fois d’une façon aussi vigoureuse, aussi amère. Pendant de longues minutes je suis cerné par les madones et les crucifiés. Pas un panneau, pas une stature qui ne soient encartés dans ce légendaire dictatorial. Splendeurs touchantes. Beautés bouleversantes. Un art sublime, indépassable. Pathétique. Ecoeurant.
Dans le Détroit de Messine la clameur se fait de plus en plus forte, lancée par Plutarque au 2ème siècle de notre ère : Le Grand Pan est mort, le Grand Pan est mort. Ce fut un tsunami idéologique. Celui-là même sur lequel Constantin en stratège opportuniste a si bien surfé. Plutarque annonçait la disparition du monde antique.
Mais c’était il y a 18 siècles ! Que s’est-il passé depuis ? Cette disparition a-t-elle été confirmée. A-t-on pratiqué une autopsie ? A-t-on même ne serait-ce que vu le cadavre ? Dans le Palazzo je ne cède pas à la panique. Car c’est une autre clameur que j’entends dans le Détroit qui se répand dans le monde contemporain : l’annonce de son retour ! et avec lui toute la brutalité et la beauté du monde antique…
J’ai des preuves.
*
Devant l’Hôtel des Etrangers, à Ortigia précisément, où je suis descendu, le Sea Shepherd est à quai. Navire Némésis lancé contre les bandits des mers, il attend le retour de son capitaine, Paul Watson. Le fondateur de Green Peace est à Paris ce même jour pour le rendez-vous de We Are Ocean au cinéma le Grand Rex. Il y invite la planète à méditer pendant 24 heures pour mobiliser les consciences et sauver les océans et l’Humanité. N’est-ce pas le retour de la pensée magique qui entraine dans son sillage une bonne partie du monde antique ?

Au siècle dernier la pensée magique apparaissait comme un aimable divertissement que l’on mourrait d’envie de prendre au sérieux mais au dernier moment un grain de sable rationaliste et mal intentionné grippait le mécanisme. Elle connait depuis le New Age un retour en grâce sanctifié souvent et tout spécialement ce soir dans cette salle de spectacle parisien. Le show mystico-techno est relayé au monde entier par le Net bien entendu. Pour autant Paul Watson n’est pas en lévitation. Le Sea Shepherd est un principe de réalité pur et dur et Watson, un guerrier pas un pasteur. Peut-être un moine soldat comme dit Bernard de Clairvaux, plus doux qu’un agneau et plus terrible qu’un lion. Il a su créer des alliances et faire travailler ensemble Lug et Héphaïstos. Le premier a tous les talents : charpentier, forgeron, échanson, champion, magicien, harpiste, poète, il est le dieu polyvalent des iles du Nord. Le second, après son apprentissage dans les forges de l’Etna, est devenu le Dieu des roboticiens et des cyborgs. Tous les deux sont là pour gagner la guerre. Couple d’enfer. Ils veulent reconquérir les territoires qu’ils estiment être les domaines des dieux : les cieux d’Ouranos, les mers de Poséidon, les forêts des Dryades, les carrefours d’Hermès… Espérons que Paul Watson ne sera pas dépassé par les puissances vengeresses de ces créatures incommodes. On a vite fait de jouer les apprentis sorciers.
*
Quittons le Sud de l’île mais pas les sorciers, pour le Nord.
Car il nous fait maintenant explorer et fouiller, arrestoier et
rencapuchonner, saltimbanquer les possibles : c’est
qu’Aleister Crowley vient de pointer le bout de son nez. Je
l’avais laissé autrefois dégustant son absinthe sous les
poutres de la Tour de Londres avec John Dee, mage
d’Elizabeth 1ère et fondateur de l’Ecole de la Nuit, une
société secrète accusée d’avoir propagé l’athéisme en son
temps et de procéder à des pratiques occultes. Peut-être
n’avait-elle d’autre objectif que de protéger les sciences
émergentes de l’époque contre les conservatismes
religieux. Je laisse en décider les spécialistes. Marlowe
venait d’écrire son Doctor Faustus et Shakespeare finissait
La Tempête … « L’histoire de l’humanité est folie, susurra-t-il
un soir à l’aéropage de savants et sachants qui veille sur sa mémoire, mais pour montrer cette folie, il faut la jouer sur une île déserte ; ce sera l’île de Prospéro où se déroule l’histoire du monde. Elle est lutte pour le pouvoir, meurtre, révolte et violence ». Il ajouta : « Je me suis inspiré de John Dee pour le personnage de Prospero ».
Ai-je besoin de rappeler que Prospero est un magicien qui règne en maitre sur son île ? Qu’Alistair Crowley se réclamait encore de John Dee quatre siècles après la mort de ce dernier ? Que le merveilleux Marlowe finit probablement assassiné dans les bas-fonds de Londres ? Que les aspirations les plus sublimes côtoient chaque jour les plus ignobles déviances ? Que les dieux sublimes du panthéon gréco-romain sont aussi les plus infâmes salauds ?
*
En route vers Cefalu, donc! Dans les années 20 du siècle dernier, Crowley, mage sulfureux de son état, grand voyageur, grand obsédé sexuel, grand maitre de l’occulte, s’installe dans une ferme au nord de la Sicile. Selon les acteurs et témoins de l’époque, il y concentre à peu près tout ce que l’imaginaire de la perversion et du macabre peut imaginer. Il se fait virer par Mussolini.
Aujourd’hui, la nouvelle Abbaye de Thélème conçue par Crowley est en ruine. Le souvenir du mage est une épave mémorielle qui échoue de temps à autre sur les rives des magazines en ligne. J’en repère un particulièrement croustillant sous la plume de l’artiste anglais Brad Feuerhelm qui raconte sa dernière visite il y a 2 ans. J’en découvre une autre dans l’étonnant bouquin d’Ewen Chardronnet Mojave Epiphanie qui vient de paraître chez Inculte et que je lis durant ce voyage. Ces deux auteurs évoquent la curieuse épopée suivante : dans sa période faste Crowley s’empare de l’Ordo Templis Orientis qui a tout d’une secte sulfureuse dont je vous épargne les mésaventures. Elles sont croquignolettes. Ce que je retiens ici c’est que Jack Parsons, pionnier américain de la propulsion spatiale, passionné de science-fiction, fut un adepte convaincu du sorcier britannique en compagnie de L. Ron Hubbard, le fondateur de la scientologie. J’ai toujours été convaincu d’une contagion entre sciences occultes et science-fiction. Les membres de l’Ecole de la Nuit, les sir William Raleigh, aventurier et conseiller de sa reine, les Thomas Harriot, mathématicien et astronome, et tant d’autres sorciers et savants visitaient Henry Percy, le « comte-sorcier » de Northumberland emprisonné dans la Tour de Londres après la Conspiration des Poudres.
Crowley m’indique de la main ses derniers zélateurs, ses amants inventeurs de fusées, les auteurs de SF de l’époque qui le courtisaient, tous plus ou moins sorciers, plus ou moins illuminés… Il regarde la gravure et évoque les vêpres siciliennes de son regard torve. Les conspirateurs, ça le connait. Les guelfes d’aujourd’hui sont pour la religion, les gibelins pour la science et ça continue à se massacrer.
*
Est-ce que je feins de croire à une coïncidence entre Paul Watson et Aleister Crowley et consorts ? Savants et sorciers, mécaniciens quantiques et navigateurs écologistes font tout
pour faire revenir une pensée magique matinée de poudre à canons ou à fusées.

3. Explicit.
Voici donc ma fiction Sicilienne à mi-chemin entre un passé plus profond qu’un trou noir et un futur qui va nous les faire découvrir… c’est le propre même des outils de la mesure du monde : voir d’où on vient pour voir où on va… Le voyage ne fait que commencer. Je regarde à nouveau ma carte de pirate.
La gorgone à trois jambes en hélice dont la Sicile fait son symbole révèle ses origines occultes cachées derrière une justification géographique peu compromettante. Te Fe’e , la grande pieuvre dans le triangle polynésien, organise le monde archipélagique.
Les pirates des Caraïbes désorganisent le commerce transatlantique, les trois jambes de Thrinakìa protège la Sicile. Mon compteur Geiger avait prévenu : protection, terreur, croissance – chacune de ces phases s’empare d’une île un jour, puis le lendemain migre sur une autre. Effet de contamination culturelle. Toute île est un concentré du monde.
*
La Sicile est un vortex.
Vous n’y pouvez plus grand-chose. Au mieux puis-je vous encourager à continuer la lecture de vos propres mythes fondateurs. Après tout vous avez votre propre jungle mythologique à explorer. Un voyage peut donner des clés pour en repérer le cadastre. L’indice Sicile est pour ce qui me concerne la dernière couche de cette réécriture de la nuit de mes temps. Chaque couche effacée puis réécrite d’île en île monte en spirale pour raconter le rôle symbolique et mythologique de l’île en soi. Ce serait un précis de nissonologie. Mais l’en soi, c’est un peu facile, c’est très abstrait.
Qu’est-ce qui se joue entre Bornéo, les îles Vanilles de l’Océan Indien, les îles du Golfe du Morbihan, Manhattan et la Sicile ? Quelle est cette partie d’échec mythologique dont je suis le roi menacé ou le fou dans sa diagonale ? C’est quoi ce royaume maritime protégé/cerné, cet omphalos des origines, ce nombril du monde ?
*
Le copiste gratte et ponce le parchemin et se remet à l’écriture d’un nouveau récit.
J’ai encore à gratter et encore à poncer et encore et encore.



22 décembre 2016, 9 h 29 mi
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thrinakia

 

catania

Thrinakìa 3a edizione
Concorso internazionale di scritture autobiografiche, biografiche e poetiche dedicate alla Sicilia

Sezione Diari di viaggio

Archeologia di un futuro siciliano
Di Christian Gatard
Prima opera classificata Sezione diari di viaggio

«Questo testo è simile a un diario di viaggio, un viaggio nello spazio e nel tempo. Esploro la Sicilia per piccoli tocchi.
In rotta. Il vento, il vento dello stretto, spinge la nostra imbarcazione verso Messina. È qui che ha inizio il viaggio. Dopo avere infine attraversato lo stretto, il viaggio ha poi effettivamente inizio a Catania. Atmosfera sorprendente.
Le isole si sincronizzano. Sono luoghi di gioco di bambini eterni, come siamo tutti noi. Ci dicono la stessa cosa: che la morte è un gioco, che queste sono dei punti di riferimento per i pirati, e che i pirati danzano con i compagni. Ci dicono inoltre che sono un concentrato del mondo, un cosmo in miniatura, quindi un luogo attraverso il quale decifrare il mondo e il suo divenire.»

Christian Gatard
Sociologo atipico, romanziere e saggista, approfondisce le sue riflessioni che confluiscono nei suoi studi, nella profondità e nella curiosità del suo animo.

Visto dall’altra parte
Di Emilio Labianca
Seconda opera classificata Sezione diari di viaggio

«Lo sguardo fisso davanti a me, ho la sensazione di camminare, me ne accorgo da quell’andirivieni di tutto ciò che incontra la mia vista. Cerco, voglio, mi sforzo di scrutare ciò che mi circonda, ma una forza indecifrabile e indefinibile non mi permette di muovere gli occhi a mio piacimento. L’osservazione si dirige altrove, magari dove non voglio, dove non avrei mai pensato di guardare. La percezione delle immagini è la mia, la direzione verso cui si volge no.
Io in questi luoghi ho vissuto da bambino la bellezza e le contraddizioni di questa terra, e di essa mi accompagnano sempre vaghe ma profonde sensazioni, intensi odori e delicati sapori.»

Emilio Labianca
Consegue il diploma di maturità classica e si laurea in Architettura all’Università La Sapienza di Roma iniziando la professione di architetto.
Dedica parte del suo tempo libero a scrivere storie e romanzi, coltiva con continuità passioni quali la lettura e la pittura.

Chaos
Di Paola Santacroce
Terza opera classificata Sezione diari di viaggio

«La mia vicina sfoglia una rivista con la serenità di chi sta seduto sul divano di casa, mentre io mastico nervosamente una gomma e aspetto il decollo. Penso ad altro e l’unica cosa che prende forma nel cervello è il libro di geografia delle scuole medie, l’immagine colorata dell’Italia, lo stivale che prende a calci un ciottolo a forma di triangolo e tutto il mare intorno.
Il volo rimborsa le distanze e mi consegna una Sicilia integra. A me, che sento di assomigliare un po’ a quel ciottolo, reduce di bilanci in perdita di ostinazioni e fallimenti. A me, che qui non volevo nemmeno venire, proprio a me quest’isola mi sta accogliendo come un fuggitivo.
Eppure ci sarà una ragione per questo viaggio controvoglia, per queste sensazioni emerse dall’abisso. Ma certo che ci sarà un motivo, e mentre lo penso ho già deciso di afferrarlo. Così mi lascio coccolare, senza chiedere asilo e senza l’obbligo di firma.»

Paola Santacroce
Nasce a Jesi. Ispettore della Polizia di Stato, ha conseguito nel 2007 la laurea in Comunicazione Internazionale presso l’Università per Stranieri di Perugia.
Nel 2013 inizia a scrivere racconti brevi e da allora continua a immaginare storie e personaggi che le fanno compagnia mentre prendono forma.
Dentro fa passare anche la sua vita, il suo essere mamma di due figlie, alle quali desidera mostrare quanto vale un sogno e quanto è bello realizzarlo. Senza fermarsi e senza smettere mai di crederci.



Archéologie d’un futur sicilien
27 novembre 2016, 13 h 19 mi
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Ma nouvelle « Archéologie d’un futur sicilien » primée par Thrinakia dans la section Carnets de Voyage
🙂

Reception le samedi 17 décembre à Catane

thrinakia



Un mix d’entreprenariat culturel et d’ études marketing internationales.
20 novembre 2016, 7 h 21 mi
Filed under: Non classé

Les études de marché doivent être culturelles, contextuelles, anticipatrices.

Mes conférences « out of the box » ont été applaudies à Paris, Bordeaux, New-York, Londres, Casablanca, Lomé…

Invitées par TBWA, BETC, Leo Burnett, Ogilvy, Quai des Orfèvres, Master Group Océan Indien, CBA et de nombreuses agences de com, de design, de stratégie. Par Orange, Chanel, GMF, La Poste, Danone, Kronenbourg, Le LAB Laboratoire Assurance Banque et de nombreuses grandes marques…

Mon approche est centrée sur les mutations de la société contemporaine et la compréhension des contes populaires antiques et à venir que les marques construisent. Je repère un futur inspirant et décapant grâce à un réseau international d’experts et de futurologues. « Aventurier de l’éventuel », voyageur impénitent, je publie régulièrement des articles liés à l’innovation sociale et culturelle et intervient dans différentes écoles et institutions (EHESS, CELSA, Sciences PO…).

J’ai publié une dizaine de livres, romans, récits et essais dont Nos 20 prochaines années, le futur décrypté, essai de prospective buissonnière (2009), Mythologies du Futur (2014), Rupture vous avez disrupture (2015), Chroniques de l’intimité connectée (2016) . Je dirige la collection « Géographie du futur » aux éditions de l’Archipel et « Futurs en feu » aux éditions Kawa et sur le site FuturHebdo.

C’est un souffle nouveau dans les études de marché. On en parle ?

Christian Gatard +33(0)6 07 74 07 71

christiangatard@gmail.com



Chroniques de l’intimité connectée
27 septembre 2016, 12 h 40 mi
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Christian Gatard donne vie aux statues hausmanniennes de Paris, et on assiste à une bataille cataclysmique entre les griffons et les atlantes sous le regard passif des mascarons, mascottes des propriétaires bourgeois, débonnaires et prospères.
Puis il nous fait assister dans une deuxième nouvelle à la Conférence des Singes, des Sages et des Songes… Un spectacle interplanétaire qui a fait un triomphe en Aldébaran et en Bételgeuse. La Conférence des Singes, des Sages et des Songes voyage partout dans l’univers et suis sûr que vous irez l’applaudir.

Henri Kauffman



nouvelle contribution
17 septembre 2016, 19 h 23 mi
Filed under: Non classé

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Rentrée scolaire rime avec rentrée littéraire et la prospective y va aussi de son ouvrage. Cette semaine, les Editions Kawa, publie « Chroniques de l’intimité connectée », le nouveau livre collectif du think tank « Les mardis du Luxembourg ».

Le pitch du livre : « Et si des prospectivistes, des marketers, des chercheurs, des professeurs, des philosophes, des penseurs décrivaient quelle intimité nous attend dans 10 ans, 30 ans, voire 100 ans ? Et si au lieu d’écrire un livre illisible réservé à des rats de bibliothèque ou des experts en expertise, ils utilisaient un style littéraire dans le format court de la nouvelle, en romançant un futur de moins en moins saisissable, Internet oblige ? »

Pour ce livre, Christian Gatard , animateur du bureau d’études internationales éponyme et conseil en prospective,  propose deux nouvelles sur le mode du réalisme fantastique.

Avec Christian, les autres auteurs qui ont participé à cet ouvrage collectif :

§ Olivier Parent , animateur de FuturHebdo, chroniqueur au Huffington Post, conseil en Prospective

§ Philippe Cahen Chroniqueur à La Tribune. Auteur de «Signaux Faibles mode d’emploi»

§ Philippe Boyer Chroniqueur à la Tribune, auteur de publications sur le marketing et la relation clients.

§ Jean-Marc Goachet, spécialiste de la communication digitale. Administrateur de l’Adetem

§ Gérard Haas Avocat en Cour d’appel, juriste spécialiste en droit de la propriété intellectuelle

§ Annabel Hofnung fondatrice http://www.protendances.com , « Digital Business Developer »

§ Henri Kaufman Il pratique la Sérendipité & Psycho/Neuromarketing. Dr éditorial aux Ed. Kawa.

§ Yves Krief, président de la Sorgem. Auteur d’articles et de « L’Imaginaire de marque » (Ed. Kawa).

§ François Laurent, Dr en Sémiologie. Coprésident de l’Adetem, consultant et enseignant.

§ Alexandre Rispal, Conférencier, formateur, Co-auteur de plusieurs ouvrages sur le marketing.

§ Véronique Varlin, Partner Havas Worldwide. Consultante en stratégie et planning stratégique.

§ J-J Vincensini est médiéviste. Il participe à des études de discours politiques ou publicitaires.


Déjà en vente online sur le site des Editions Kawa :
 http://www.editions-kawa.com/home/162-chroniques-de-lintimite-connectee-les-mardis-du-luxembourg.html



Conférence à Casablanca
8 avril 2016, 13 h 24 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

http://socialimpulse.net/interview-de-christian-gatard-sur-la-marque-digitale/INTERVIEW DE CHRISTIAN GATARD SUR LA MARQUE DIGITALE

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Pourquoi la digitalisation des marques s’impose-t-elle et s’accélère ?

La société d’aujourd’hui est définie par certains sociologues comme hyper moderne ou même «liquide ». Le comportement du consommateur change. Le consommateur d’aujourd’hui apparaît multiple, informé, volatile, paradoxal. Il zappe au gré de ses envies et de ses intérêts. Comment le cerner, l’approcher, le comprendre… pour le convaincre et le fidéliser ?

Internet est à la fois le problème et la solution. C’est lui qui change le monde et c’est là qu’on doit accompagner les changements du monde.

La nature même d’Internet nous oblige à nous placer du point de vue de l’utilisateur.

«La prochaine génération d’Internet deviendra le média le plus puissant de l’histoire, parce qu’elle fusionnera l’imprimé, la télévision, le téléphone, la radio et l’ordinateur.»

Avec l’i-pad, cette nouvelle génération d’Internet est là.

L’effet de «bouche-à-oreille» des médias sociaux va s’amplifier.

Et Internet sera – nous en sommes persuadés et nous voyons cette dimension émerger tous les jours – un formidable outil  de créativité personnelle, de connections , et de vivre ensemble dans le monde réel.

Comment peut-on intégrer ce concept dans l’ADN et la stratégie de marque ?

Le consommateur nouveau est arrivé. Il faut aujourd’hui: entrer en conversation avec lui, l’accompagner dans ses nouveaux modes d’expression, explorer ses préoccupations autant que sa sagacité et sa curiosité, le valoriser comme partenaire de la recherche… et utiliser les medias qu’il utilise. Toute stratégie de marque est une stratégie de conversation

Il faut interroger la notion de transparence et ses limites :  tout est dit, écrit et publié sur tout dans l’instant et par tous. Comment allons-nous, en tant qu’individu, citoyen, consommateur, gérer cette transparence?  Il faut sans doute en envisager l’implosion prochaine. Puis renons conscience que se construit dès aujourd’hui l’hybridation du monde  (hybridations des cultures, influences et inspirations venues d’ailleurs, rencontre homme/machine à travers les promesses « étranges » du transhumanisme). Enfin surveillons  ce que je nomme l’ère de l’allégeance rebelle. C’est l’idée qu’il faut bien faire allégeance à un certain nombre de choses: la planète qu’il faut protéger ; les estomacs qu’il faut remplir ; la technologie qui n’en fait qu’à sa tête; le monde qui est cruel et injuste … Et c’est surtout l’idée qu’il y a mieux à faire que s’indigner. En prenant de l’avance sur le futur en rejetant les conventions, en apportant à l’entreprise une énergie inspirée par les meilleures pratiques du monde contemporain, par les expérimentations sociétales réussies où que ce soit dans le monde. L’allégeance rebelle est là pour inspirer, impulser, tenter des coups, jeter les dés…on anticipe pas le futur, on le crée!

On va à la fois reconnaitre que les forces de l’histoire sont irrésistibles, que les mythes anciens sont les scripts du futur… et qu’il faut – car c’est dans la nature de l’homme – les contester. Chaque homme est un artiste qui doit trouver son art…  Donc je suis positif.

Qu’est-ce qui permet de garder espoir?

Le fait que toute époque est un moment de mutation qui a toujours été vécue avec un peu d’effroi mais que l’idée d’une Renaissance permanente est profondément ancrée dans l’âme humaine et que l’humanité a toujours survécu à ses crises. Nous avons sans cesse à apprendre du reste du monde. Les nouvelles technologies vont nous aider car la puissance des machines pourra être mises à notre service dans l’ombre, dans l’intimité des hommes de bonne volonté.  Des artistes “poly-industriels”, des  chercheurs, des techniciens, des savants inconnus encore sauveront le monde par petites touches, sans effet de manche et avec passion…

Qui sont les ressources concernées en entreprise par cette transformation ?

L’entreprise doit prendre conscience que c’est la totalité des ressources qui est concernée. Marketing et commerciaux, ingénieurs et ouvriers, directions générales et secrétariats , c’est l’entreprise en tant qu’entité vivante, « organique » c’est à dire objet vivant dont tous les organes comptent , qui est en jeu.

Les générations Y et Z sont-elles pour quelque chose dans cette évolution des marques ?

Elles seront , elles sont déjà, essentielles. Les nouvelles technologies sont pour elles une évidence  avec une externalisation de leur cerveau dans leur poche. Leur quête de plaisir et d’émotions fortes domine :  hédonisme,  sensationnalisme, expérimentation. Leur curiosité insatiable va accélérer leur tendance au zapping tant au niveau personnel que professionnel. Elles sont à la fois individualistes et tribales le « moi-je » et le « nous tous » convergent. Solidarité et égoïsme cohabitent. C’est une dynamique sociétale que toutes les entreprises devront prendre en considération.

Quelles perspectives et quelle prospective feriez vous pour les marques digitales ?

La survie des marques est dans le digital mais pas dans l’exclusivité du digital.

Il va falloir s’habituer à surfer en permanence sur ces mutations de plus en plus rapides, de plus en plus étonnantes, de plus en plus fécondes. L’humain sera plus que jamais au cœur du digital et cela devra se traduire dans la communication, dans les RH, dans la construction des images de marques. La pub traditionnelle est en train de se repenser… bref il y a là un vaste de champ de curiosité, de réflexions, de scenario – les marques vont devoir choisir leur « grand récit ». Parmi les récits du futur je distingue trois grands territoires, historique, ludique et océanique, qui prennent sans doute en compte les besoins d’appartenance, d’estime de soi et de connaissance. Chaque marque doit choisir celui qui convient le mieux à son accomplissement.

Est-ce suffisant ?

Pour que les marques ne soient pas que l’emblème d’un savoir-faire mais qu’elles participent d’un savoir-être qui sauve la planète de ses fractures et de ses indigences, il faudra passer à un autre registre. On sera peut-être un jour plus vieux, plus sage qu’autrefois et , peut-être, plus sensible au monde qui nous entoure, plus collectif, plus national probablement mais plus citoyen du monde sûrement. Les marques océaniques auront une saveur transculturelle avec une légitimité? planétaire. Les marques historiques ajouteront la patine d’ancêtres retrouvés dans les arbres généalogiques que seul Internet, la bibliothèque-monde, pouvait révéler. Les marques folkloriques  insuffleront de  l’impertinence, de la créativité, de l’allégeance rebelle.

Christian Gatard

Conseil en prospective et innovation. Ses « conférences-performances » font comprendre les mutations en cours. Il a publié une dizaine de livres, romans, récits et essais dont Nos 20 prochaines anneées, le futur décrypté, (2009), Mythologies du Futur (2014) et Rupture vous avez disrupture (2015).



L’influence, la civilisation, le cholestérol et Shéhérazade
13 février 2016, 11 h 12 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

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Proposition de Christian Gatard

 

L’influence est civilisatrice, Shéhérazade aussi.

L’influence c’est ce qui nous surplombe et nous observe, nous guette et nous prend au dépourvu. C’est la matière brute de la civilisation. Pour le pire et le meilleur. C’est l’histoire du bon grain et de l’ivraie.

L’influence est civilisatrice.

C’est comme le cholestérol

Il y a le bon :

Depuis la nuit des temps elle crée de la matière culturelle. Son économie fonde la vie en société. Elle façonne les convictions qui fabriquent des comportements qui produisent de la conformité. La conformité ce sont les règles du jeu qui produisent un environnement culturel : de l’affinité, de la ressemblance, de la cohésion. Si vous êtes en conformité, c’est que vous avez passé l’examen de reconnaissance publique. Vous êtes certifié conforme. Vous êtes habilité à faire partie de votre environnement. Bref vous fabriquez du civilisé. Merci Aristote qui fonde les bases de La Rhétorique. Cicéron (in www.unige.ch ) lui attribue un rôle central dans la vie du citoyen romain. Celui-ci est en effet appelé à s’exprimer efficacement en matière politique, juridique ou économique. Quel que soit le sujet abordé au forum, autrement dit sur la place publique, le citoyen romain parfait doit donc toujours pouvoir exprimer son point de vue et, autant que possible, le faire partager aux autres. La rhétorique lui donne précisément les moyens de s’exprimer efficacement. Elle s’étend plus généralement à l’art de persuader, d’influencer le destinataire du message par toutes sortes de techniques, verbales et non verbales.

L’influence, elle vous saute aux yeux quand vous visitez Le Louvre. Chaque siècle, chaque culture a ses salles qui ont chacune une identité « influencée » par l’air de leur temps, leur ZeitGeist. De toutes façons vous ne pouvez pas faire autrement. Warhol, ça n’aurait pas marché sous Louis XIV. L’influence esthétique suggère l’imitation d’une œuvre ou d’un style par un admirateur, ou du moins la reprise de thèmes et codes d’un auteur ou d’une école. Influencer, c’est être admiré ou imité.

Dans la pensée chinoise, l’influence, c’est une vision générale des relations humaines, une pensée de l’opportunité, de l’efficacité et de l’incitation (in www.huyghe.fr,) . Gérard Klein, écrivain, anthologiste, économiste, prospectiviste, théoricien pose la question : “Un être humain isolé peut-il penser ?”. Il y répond par la négative : pour penser, un être humain doit posséder le langage. Le cerveau apprend le langage en recevant des informations de son environnement et de son groupe social. Les sources “extraordinairement multiples” qui nourrissent le cerveau sont émises par ce que Gérard Klein appelle les “subjectivités collectives” et qui, elles-mêmes, naissent des relations qui structurent le groupe social. La conscience, la pensée n’est possible que parce “chacun de nous est un ensemble de subjectivités collectives” (in http://www.peiresc.org/, séminaires fréquentés par l’auteur ). L’influence sociale fabrique de l’imitation et de la conformité autour d’un projet collectif. L’influence génère un vivre ensemble, une culture, une civilisation.

L’influence est aujourd’hui considérée comme la caractéristique des sociétés contemporaines: fabriquer du spectacle, du pouvoir, de la sidération, du désir.

Le mythe de l’éternelle jeunesse, le mythe de la performance sexuelle, le mythe de l’amour romantique, le mythe de la puissance automobile et celui de l’harmonie sociale… James Bond, Barbie, les motos Harley Davidson sont autant de récits qui véhiculent des idéaux sociétaux et influencent les us et coutumes.

Ce fut aussi le rôle des mythes qui transmettaient la compréhension antique du monde. Rien de nouveau sous le soleil.

Il y a le mauvais :

Le conformisme. C’est quand cette conformité devient dictatoriale. L’influence a toujours été considérée, par ses détracteurs, comme une technique de «manipulation». Aujourd’hui la rhétorique a plutôt mauvaise réputation. Elle est synonyme d’hypocrisie, de mauvaise foi.

On s’en méfie au motif qu’on estime ne pas devoir se laisser dicter nos pensées et nos actes. L’individualisme triomphant fils de la Renaissance et des Lumières ne veut pas se soumettre à l’influence des autres. La révolution romantique entérinera les valeurs de spontanéité et de sincérité. Le conformiste s’est laissé berné par les influenceurs. Il a perdu pied. Le conformiste est le grand manipulé, noyé dans des tsunamis d’influences. Mais qui lui jettera la pierre ? On a tous une influence qui s’empare de nous à un moment ou un autre.

Il y a le pire :

Cortes débarque au Mexique en 1521 avec sa politique de table rase des croyances indigènes. Les Missions débarquent dans les mondes nouveaux, la colonisation bat son plein.

Influencer c’est massacrer les croyances et les humains.

Les mythes complotistes fabriquent de la haine sociale. Massacre du bon sens. Les théories du complot font le lit des tyrannies. Torquemada et l’Inquisition, Daech et ses couteaux… leur évocation décourage l’idée même d’utiliser le mot influence qu’on leur accole.

*

Les Grecs ont ouvert la voie aux premières techniques d’action sur le psychisme humain. Après eux propagandistes, publicitaires et autres manipulateurs ont cherché à reproduire à l’usage des foules et avec des moyens de masses ce que les orateurs athéniens faisaient à des individus en face à face. Il existe une tradition intellectuelle grecque de la ruse (la métis), avec une foule d’exemples que nous appellerions aujourd’hui de désinformation, d’intoxication, d’action psychologique…(in www.huyghe.fr, )

Une seconde ! Cette lecture pessimiste et désabusée de l’influence est un peu courte.

Le Conte du Graal de Chrétien de Troye?

Werther de Goethe ?

René de Chateaubriand ?

Ivanhoé de Walter Scott ?

Autant d’œuvres « influentes » qui ont radicalement « informé » leur temps, et bouleversé les cœurs et les mœurs.

*

Il faut repenser la métis et convoquer à nouveau la déesse. Métis est la personnification de la sagesse et de l’intelligence rusée. Pas si mauvaise fille que ça. La ruse sera notre meilleure alliée. Avec la physique quantique et l’astrologie pour témoins. La physique quantique parce que c’est le récit mythique des temps à venir. L’astrologie parce que la pensée magique fait son retour.

En physique quantique, http://www.inrees.com/articles/Esprit-matiere/ on avance que les caractéristiques de l’objet réel ne «naissent» qu’une fois réalisées les mesures permettant de les mettre en évidence. Autrement dit, l’objet réel reste suspendu dans un flou de potentialités tant que personne n’a décidé de le voir, le toucher, le mesurer. Et s’il en était de même avec les influences ? Et si l’on était plus malin qu’elles ? Et si on laissait passer la caravane des mythes sulfureux et délétères pour ne laisser advenir que ceux qui sauvent le monde ? La balle est dans notre camp pour décider des influences et des légendes qui vont faire le job.

En astrologie, étymologiquement, influence renvoie au fluxus, cet influx invisible qui était censé descendre des étoiles et changer le destin de chacun, du moins c’est ce que l’on croyait au XVII° siècle, quand le mot influence apparaît dans notre langue. (in www.huyghe.fr, blog décidément inspirant). Le cosmos, les étoiles, offrent tous les jours des surprises sidérantes qui semblent remettre en selle la pensée magique antique. L’influence des astres sur nos comportements ne serait pas une pensée si absurde. Certes, il faut ruser et naviguer entre charlatanisme, fictions et réalités à découvrir. Mais aussi admettre que le poids des puissances symboliques et des imaginaires sociaux – le légendaire au cœur des influences qui font une civilisation – sera la clef de notre destin.

Et nous pourrons écouter Shéhérazade raconter mille et une nuit les histoires qui endorment le sultan pour qu’il se réveille apaisé et qu’il renonce à ses massacres.

(une première version de ce texte est paru dans INfluencia)

 



Au nom d’Alexandre
22 janvier 2016, 17 h 52 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

Au nom d’Alexandre

d’Olivier Auroy

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Qu’est-ce qui fait d’AU NOM D’ALEXANDRE un livre absolument juste, pétillant, hilarant, émouvant et cathartique ?

C’est la question qui m’a accompagné tout du long de la lecture – sans jamais la gâcher, plutôt en la stimulant.

Il y a d’abord, d’entrée de jeu – et je ne spoile rien, c’est la première phrase – la narratrice – Fanny . Son job est d’écrire la vie d’Alexandre qui est en fin de vie. Belle invention littéraire : raconter épuise Alexandre et c’est pourtant cela même qui le maintient en vie. Il y a là quelque chose de léger et grave qui est la couleur même de ce récit tout en tensions de la même qualité. C’est peut-être ça qui en rend la lecture jubilatoire et mordante. Car une autre tension vient se greffer sur la première – ce pour quoi et ce comment la vie d’Alexandre fait sens : le mot, les mots, l’invention des mots qui commencent par être une passion puis devient une profession et reste une adoration. Alexandre dévoile à Fanny une série de mots inventés (tous plus malins et pertinents les uns que les autres) pour des situations de la vie quotidienne, pour des produits de consommation, pour des cocktails… et peu à peu pour des causes de plus en plus conséquentes – des armes de destruction plus ou moins massive jusqu’au nom du … non là il ne faut pas spoiler car quand on arrive à ce stade du récit je suis devenu Fanny. J’ai eu sa curiosité et son empathie envers Alexandre, j’ai découvert séance après séance son don pour les mots, le jeu avec les mots, sa capacité à nommer les choses, avec science, humour et pertinence. Comme elle j’ai admiré et aimé ce mourant vitupérant et flamboyant. Comme elle j’ai été fasciné par le récit d’une vie à rebondissements, inspirée et traversée par des personnages formidablement campés – les deux grands-pères, la femme de sa vie, l’ennemi, les copains…

Et puis dans les interstices du récit se tisse une ultime tension que l’auteur aborde avec une infinie délicatesse, l’air de ne pas y toucher et qui pourtant dégage une émotion puissante au terme d’une lecture haletante: l’invention des mots c’est la création du monde. Alexandre, inventeur de mots, a quelque chose d’un démiurge – le dénouement le suggère avec autant d’émotion que d’humour. Bien sûr Olivier Auroy est bien trop subtil pour le dire aussi sentencieusement. AU NOM D’ALEXANDRE est tout en nuances … et en coups de poing. Une lecture stimulante, inspirante.

http://livre.fnac.com/a9204398/Olivier-Auroy-Au-nom-d-Alexandre

 



Le Big Data , les devins , Sherlock Holmes et les autres…
12 janvier 2016, 17 h 15 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

bigdataLe Big Data : quelle aubaine pour les  chercheurs en mythologie et en imaginaire !

La nature du Big Data n’étant pas bien facile à cerner pour le grand public,  les mythes d’aujourd’hui font leur miel de cette incertitude. Les medias s’emparent du sujet, le buzz internet le crée ou le prolonge, Hollywood le dramatise (Orwell continue d’inspirer les visions d’un futur terrifiant à base de surveillance généralisée, de maîtrise du cosmos grâce à des ordinateurs surpuissants… ),  les plus optimistes l’idéalisent (repérage de l’âme-sœur ou  détection des catastrophes grâce à des terraoctets d’information …).

Entre l’option utopique et l’option dystopique, la représentation qui a une petite longueur d’avance, c’est tout de même que chacun se croit (voire se sait) cerné, repéré, ciblé dans son scenario de vie, surveillé par une « puissance de calcul » dont les pouvoirs sont quasiment divins. Et en l’occurrence aux mains des Dieux du commerce surtout attentifs à en tirer partie pour leur chiffre d’affaire ou des Dieux du politique pour la sécurité de leurs territoires. Le Big Data surplombe l’imaginaire contemporain sans qu’on sache encore très bien s’il est une menace sur nos libertés ou une possibilité de sauver le monde. Relève-t-il d’Hypérion,  dieu de la surveillance et de l’observation ?

Le Big Data est-il la figure contemporaine digitalisée d’un dieu unique omnipotent, omniscient, omniprésent ? D’ailleurs à l’égal de tout dieu qui se respecte il a sa part d’ombre, d’incompréhensible, voire d’improbable. Le buzz du moment c’est qu’il repère la totalité des informations disponibles dans le monde pour savoir où je vais acheter mon prochain paquet de lessive (ma prochaine voiture, ma prochaine recharge de e-cigarette). C’est un peu réducteur mais les buzz ne sont pas souvent charitables. On peut comprendre : le plus spectaculaire du Big Data est son exploitation par un marketing de la consommation avide de cerner qui je suis, quand je suis, comment je suis, où je suis… et me prendre dans ses filets. Bref me comprendre, prédire mes actes, me vendre quelque chose.

Comprendre, prédire et réagir : trois termes qui semblent fonder le récit mythologique contemporain du Big Data…

Laissons un instant le côté inquiétant du système.

Qu’est-ce qui est en jeu ici pour le mythologue ? N’est-ce pas précisément le retour durefoulé mythologique ?

La fonction de l’oracle dans la mythologie grecque est fondamentale et notre culture contemporaine est réputée devoir tant et plus à la Grèce Antique. Le Big Data recycle-t-il la fonction de l’oracle dans la mythologie contemporaine ? Ce serait bien dans l ‘air du temps qui aime tant recycler.

Le Big Data se fait résolument oraculaire. Et on y croit. Et on a peut-être raison. Car tout cela est assez convaincant. N’est-ce pas ainsi qu’a été prévue la victoire d’Obama ? En son temps, à Delphes, la Pythie est crue. On en sourit aujourd’hui mais il y avait des gens pour agir selon l’oracle. Calcas, autre devin de renom, avait reçu d’Apollon la science, du passé, du présent et de l’avenir et en discutait avec Agamemnon et Ulysse.  Des gens sérieux. Restons dans les mythologies mais plus récentes. Hari Seldon est le héros de la saga de Science–Fiction d’Isaac Asimov, La Fondation. Il est le génial inventeur de la psychohistoirequi se targe de prévoir l’avenir grâce à sa maîtrise des probabilités statistiques.

Il y a entre les mythes antiques et la SF une complicité éclairante. Elle rappelle que comprendre, prédire et réagir sont les moyens que l’espèce humaine se donne (s’invente ?) pour tenter de naviguer dans des temps incertains et dans la brume opaque du futur.

Par ailleurs, il n’est pas sans intérêt de noter que le terme de Big Data s’incrit dans une famille de vocabulaire ayant une grande ambition dramatique, voire théâtrale. Le Big Bang des grands commencements de l’univers devait avoir une certaine gueule, le Big Crush (pour ce qui est de la fin, parfois en concurrence avec le Big Chill ou le Big Rip) ne sera pas moins spectaculaire. Comme le Big Mac. Notre époque est friande de sensations fortes. Ces évènements cosmiques sont très impressionnants. Ce ne sont peut-être que des hypothèses mais ce qui frappe l’observateur c’est la gourmandise contemporaine vis à vis du wouah effect,  c’est la fascination vis à vis de tout ce qui est de l’ordre de la sidération que ces concepts proposent. Le Big Data est assurément de cet ordre : une immensité, un vertige conceptuel.  Il évoque une totalité, une multitude,  ne le traduit-on pas par données massives  – image d’une foule immense  de données, de gens, de choses, d’images…? Or le dieu Pan est  parfois présenté comme le dieu de la foule, et notamment de la foule hystérique, en raison de la capacité qui lui était attribuée de faire perdre son humanité à l’individu paniqué, et de déchirer, démembrer, éparpiller son idole. C’est l’origine du mot « panique », manifestation humaine de la colère de Pan.

On comprend que le Big Data peut inquiéter un peu…

Et puisque c’est de mythologie qu’on tente ici d’entretenir le lecteur on peut aussi introduire un mythe plus récent et qui se manifeste par de constantes remises à jour depuis 1887 : Sherlock Holmes.

Sherlock comme antithèse mythologique au Big Data ? Son opposé, peut-être, la revanche de la « matière intellectuelle » contre la « matière calculée »?  Le plus célèbre détective de Baker Street se contente d’un indice et d’un seul pour résoudre l’énigme la plus extraordinaire qui lui soit posée tous les matins (un cheveu sur un trench-coat, un mégot de cigarette turque…) et il sauve le Royaume de Bohème.

Le tout récent Sherlock incarné par Benedict Cumberbatch utilise les nouvelles technologies sans vergogne mais dans son essence c’est toujours le même cerveau solitaire et génial qui est à l’œuvre.

Sherlock et le Big Data ont partie liée car ils ont un imaginaire commun : la connaissance et la prédiction. Connaissance de tout. Prédiction de tout. Chacun selon son art et sa manière. Sherlock, tout en énergie centripète, entièrement tourné vers lui-même et découvrant en lui-même la clef des mystères du monde. Le Big Data, tout en énergie centrifuge, balayant toutes les données du monde et les organisant en champs immenses pour les saisir et les comprendre.

Leur  affrontement (… ou leur complicité ) sera un des grands récits de notre temps.  Quel spectacle cela va être !

Christian Gatard



Lomé, Togo, décembre 2015
2 janvier 2016, 21 h 48 mi
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Lomé, Togo, au Forum des jeunes entrepreneurs. Sur le leadership. A l’invitation de Claude Grunitzky. Décembre 2015. Photo Lionel Akué.Lomé, Togo 1



L’anneau
1 janvier 2016, 13 h 24 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

L’anneau dans la gueule du lion: apprivoisement de sa nature sauvageL'ANNEAU



conférences et conservations récentes
13 décembre 2015, 8 h 36 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

dans ce post quelques videos pour préparer 2016

cliquez  ci-dessous pour engager la conversation

wordle



ENTRETIEN SUR BTLV
21 novembre 2015, 13 h 16 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

https://www.btlv.fr/extrait-video-lacceleration-de-la-production-mythique-christian-gatard-sociologue.html

Avec Yves Carra sur BTLV, dans l’émission « ON EST LA POUR VOUS ».

BTLV



Et si on prenait quelques précautions avant de faire du collaboratif le graal du 21ème
12 novembre 2015, 9 h 33 mi
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http://www.futurhebdo.fr/debat-flop-du-co/

Contribution à la pensée oblique…

futur hebdo

Et si on prenait quelques précautions avant de faire du collaboratif le graal du 21ème siècle ?

Prudemment proposé par Christian Gatard

 

Moi, je crois que ces histoires de coopération vont faire un flop mais ce n’est pas pour ca qu’il faut désespérer de l’humanité́.

Les bulles du « co », du share, du collaboratif –  sémantique et médiatique – enflent à vue d’œil. Le sort des bulles est connu, leur explosion n’est qu’une question de temps.  Oups ! Trop tard. Le « sharebashing » est en marche à l’instar du greenwashing et du Frenchbashing.

Un vent mauvais s’est levé: on parle déjà de capitalisme de catastrophe pour souligner que l’économie collaborative creuse l’écart entre ses utilisateurs et ses « inventeurs ». On pointe un clash de cultures entre les idéaux anarchisant et écolo des pionniers et l’appât du gain des « collaborateurs en chef » devenus milliardaires en quinze jours.

On lit que l’évaluation des acteurs entre eux (fournisseurs de services et utilisateurs de ces services qui se donnent des notes de satisfaction) crée une anxiété de l’économie collaborative.

Tout cela prend à rebrousse-poil l’enthousiasme béat voire hystérique qui s’était emparé des sharers. Pourtant on n’est pas près d’en voir la fin: il y a une forme d’ivresse dans ces engouements et elle se propage. C’est la vertu des utopies. Elles se répandent.

Caricaturons : pour les uns le collaboratif est une nouvelle religion, Jérémie Rifkin est son Messie. Pour les autres c’est le nouveau costume d’une prise de pouvoir par les véritables meneurs du jeu de l’espèce humaine : les oligarques parano à la Google (qui a racheté Uber).

La  technologie et l’ironie vont sauver le monde.

Bref il faut sortir de ce dilemme.  Et c’est possible parce que l’affaire n’est pas pliée.

La caricature qu’on vient de lire relève de récits qui ne sont guère bienveillants. Voire injustes. Sans doute faut-il calmer la naïveté des plus fervents apôtres…

L’affaire n’est pas pliée parce que nous sommes au milieu du gué : mon hypothèse est donc que la technologie et l’ironie vont sauver le monde.

Certes la technologie et l’ironie sont déjà présentes dans la phase actuelle que nous vivons, mais elles sont toutes deux encore gamines et mutines. Elles sont en pleine mutation. Comme nous tous. Comme l’époque que nous vivons.

 

Degré zéro du co

Aujourd’hui, la technologie – c’est le degré zéro du co – a permis de gérer la masse d’informations nécessaires à la mise en relation et à la transaction: pour trouver un taxi, un service de co-voiturage, partager un potager, un appartement ou une perceuse… Mais après l’état de grâce des premières phases de mise en place, le mythe d’une relation gagnant/gagnant est contesté. Ce système réintroduit la relation marchande : les co-acteurs cherchent à rentabiliser le temps passé. L’idéologie (fragile) d’un faire-ensemble, d’un vivre-ensemble un trajet ou autre chose a vite fait long feu… pendant que les entrepreneurs, eux, font fortune. Il n’y a pas deux gagnants, il n’y en a qu’un.

L’ironie, elle, se pavane chez les observateurs qui se gaussent un peu de la naïveté des foules. Ils sont rejoints avec un degré de cynisme plus ou moins avoué par les meneurs de jeu qui ont réussi leur tour de table. C’est une ironie un peu bas de gamme, assez facile,  voire un peu frustre.

 

Or nous sommes au milieu du gué.

Et c’est probablement la bonne nouvelle: tout reste à faire.

La technologie va évoluer et vite dépasser le graal actuel : l’internet des objets – dont on a parfois l’impression qu’il s’agirait d’un royaume autonome où les objets n’en feraient qu’à leur guise, qu’ils seraient déconnectés du monde des hommes, uniquement connectés entre eux, pas loin de fomenter leur petite révolution à la manière d’un film de Science fiction de série B. On se calme. La phase suivante ne va pas renier le collaboratif elle va le replacer sur ses rails. Elle ne fonctionnera pas sur le mode de la seule contribution de chacun au système mais sur l’émergence d’une alliance entre l’homme doué de bonne volonté et l’hyper-intelligence artificielle de la machine. Rien de bien nouveau. Tout cela s’adosse à la tradition antique et fondatrice des premiers silex prolongée par les navettes spatiales. On va appeler ça la collaboration anthropotechnique.  A priori c’est plutôt une bonne nouvelle.

 

Les mutations technologiques promises vont permettre à la multitude et à chacun d’exprimer sa différence.

Ensemble. En même temps. La technologie d’un futur sans doute proche va permettre de rendre unique chacun dans la multitude. Elle va créer de l’espace et de la respiration pour chacun. Elle va être maîtrisée et elle va disparaître, se faire discrète, humble et docile.

L’idéal collaboratif se fonde sur la vision utopique d’une humanité bienveillante. Il n’engage que ceux qui y croient. La prochaine utopie se fondera sur l’apport de l’intelligence artificielle dans laquelle l’individu sera remis à sa place (centrale) sans écraser l’autre de sa superbe mais en bonne intelligence avec lui, sans être dupe, sans haine ni violence.

La sharing economy avait juste oublié que l’homme est un loup pour l’homme et que pour museler la haine et la violence il faut deux ou trois techniques bien senties : un bouclier de bronze, un dôme de fer

L’ironie parce que si rien de tout ça ne marche il y aura toujours le sourire désabusé́ de cette femme devant une vidéo d’avant-garde au Palais de Tokyo qui n’arrivait pas à prendre au sérieux les contorsions d’une danseuse nue en train de se faire badigeonner la face de son sang menstruel par un bellâtre en toge. Elle ne parvenait pas à partager…

Tout n’est pas partageable.



MAGIE ET TECHNOLOGIE A LA GAITE LYRIQUE
31 octobre 2015, 10 h 27 mi
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video de la rencontre entre Manuela de Barros , Christian Gatard et Philippe Baudouin à la Gaité lyrique vendredi 30 octobre 2015

magie et technologie

http://gaite-lyrique.net/magie-et-technologie

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Croyance, magie et illusion croisent, dans cet essai, les sciences et les technologies. Par l’étude de textes anciens et de phénomènes historiques, l’observation de développements scientifiques et techniques contemporains, ou la mise en perspective d’éléments de la culture, artistique ou populaire, l’auteure montre comment l’imaginaire et la fiction se mêlent à la rationalité et à l’ingénierie. C’est cette hybridation de deux espaces de pensée réputés irréconciliables qui permet l’actualisation dans des objets technologiques de ce qui était fantasmes d’occultistes. Manuela de Barros montre que c’est également le résultat de choix idéologiques, politiques et économiques dont on doit remonter la genèse pour comprendre les processus de société à l’œuvre actuellement. La puissance économique et politique de notre société technologique s’appuierait-elle sur la manipulation, le bluff et la désinformation telle que les ont théorisés les philosophes magiciens dès le XVIe siècle ?

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Manuela de Barros

Manuela de Barros est philosophe et théoricienne des arts. Maîtresse de conférences (Paris 8), essayiste, conférencière, ses travaux portent sur les modifications biologiques, anthropologues et environnementales liées aux techno-sciences, les passages entre la science et la création fictionnelle, et l’esthétique.

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Philippe Baudouin

http://www.franceculture.fr/personne-philippe-baudouin.html
Chargé de réalisation à France Culture et l’auteur de plusieurs documentaires et reportages pour Arte Radio. Il a produit en octobre 2014 « Les Langues de l’éther », un atelier de création radiophonique consacré aux rapports entre radiophonie et sciences occultes (France Culture). Diplômé d’un Master de philosophie, il est aussi l’auteur de l’ouvrage Au microphone : Dr. Walter Benjamin. W. Benjamin et la création radiophonique – 1929-1933 (MSH, Prix Inathèque 2009) et a dirigé la publication du recueil Écrits radiophoniques de W. Benjamin (Allia, mars 2014). Par ailleurs, il a préfacé et dirigé la réédition du texte Le Royaume de l’au-delà de Thomas A. Edison (Editions Jérôme Millon, mars 2015).

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Christian Gatard
http://christiangatard.com/?page_id=1356
Christian Gatard a publié une dizaine de livres, romans, récits et essais dont Nos 20 prochaines années, le futur décrypté, Les clés de La Mutation, Social Media Marketing. Il vient de publier: Mythologies du Futur. Il dirige la collection « géographie du futur » aux éditions de l’Archipel. Il est traducteur d’ouvrages de psychanalyse.
Il publie régulièrement des articles liés à l’innovation sociale et culturelle et intervient dans différentes écoles et institutions (EHESS, CELSA, Sciences PO…)



lancement de TRUE Africa
1 septembre 2015, 17 h 04 mi
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cliquez dans la photo

TRUE AFRICA

Claude Grunitzky lance aujourd’hui TRUE Africa

version anglophone en ligne en attendant la version francophone

Dear Friends,

If you care about the future of Africa, please take a few minutes out of your busy schedule to check out our new baby, TRUE Africa: ow.ly/RD9FZ

We’ve been hard at work for more than a year, but before we even started ideating on the relevance of these words, photos and videos it was just a dream. A series of transcultural African imaginations. Now that we have finally given birth, we would value your comments and criticisms.

And if you like TRUE Africa, please share this post and like and follow us on Facebook at TRUEAfrica and on Twitter @_TRUEAfrica. We are looking for new writers, new photographers, new filmmakers, new talent and new partners.

We are just getting started, but your spiritual support, at this launch stage, is crucial.

We see it as the future now. Non-stop.

Much love,

Claude



Human Psycho, le témoignage d’un lecteur enthousiaste
29 août 2015, 10 h 05 mi
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http://t.co/2G8hVMbaEJ

human psycho

Human Psycho, l’immortalité, à vie, roman de Science Fiction d’Alexandre Rispal(c’est son 1er roman !) a bien plu à un de ses lecteurs, Christian Gatard. Voilà ce que Christian (que vous pouvez rejoindre sur Facebook) pense du livre :

j’ai lu d’une traite! Fascinant, terrible, puissant. Avec son intrigue,  ses personnages, sa mise en contexte dans les annexes, ton livre sort des gonds du roman classique; il emprunte les chemins abrupts du « performatif » : c’est à dire qu’il ne fait pas que décrire un phénomène il implique le lecteur dans une action.

J’ai ressenti  tout au long de la lecture une  étrangeté familière. On a  le sentiment que « l’Expérience » est en cours, ici et maintenant dans le monde réel, dans l’actualité des GAFA, dans leurs objectifs fantasmés ou pas. Par analogie ma lecture dérivait: parmi les convictions hallucinées qui s’emparent de la planète je croyais lire une métaphore de DAECH qui veut lui aussi nettoyer la terre en coupant les têtes. A chacun sa singularité! Il y a des têtes coupées dans Human Psycho.

Avec tes personnages tu convoques – frissons assurés – les récits mythologiques: le bien contre le mal (un Zeus méphistophélique – Wladimir – et son Faust – le Docteur Berger  ) , les jeunes ambitieux qui se brûlent les ailes (Icare en Victor, Julien, Adrien). La froide actualité des présentations powerpoint m’a évoqué les grimoires de magie des alchimistes à la recherche de la pierre philosophale… et donc de la vie éternelle.
Ce livre est une alerte, bien sûr. Il rejoint les cris d’Alarme lancés par les Cassandre, bien connue de nos services de veille sociologique, les Laocoon qui avertit les Troyens du danger du cheval devant les portes de la ville. Je me rassure en me rappelant que ni les alchimistes en occident, ni les prêtres taoïstes au service des empereurs du Milieu, n’ont mené à bien leurs tentatives d’apprivoiser l’éternité.Pourtant nous nous souvenons de leurs efforts, leur quête reste toujours la grande aventure du vivant: le rester le plus longtemps possible. Et ce vivant c’est précisément les grands récits que nous nous racontons de génération en génération. C’est sans doute là que se dissimule l’éternité réelle.

Dans un prochain livre, avec ce mélange très réussi de codes ultra-contemporains et d’inspirations archétypales, je ne doute pas que tu continues d’explorer les rapports sulfureux et passionnants entre science et conscience. C’est une affaire vieille comme le monde et c’est ça qui fait de la belle littérature.



Conférence aux Intergalactiques
29 août 2015, 9 h 40 mi
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Sans titre

Le livre en version conférence

Les Mythologies du futur : au risque d’un gonzosociologue @ Les Intergalactiques de Lyon – YouTube

intergalactiques



le futur du vin…
15 juin 2015, 17 h 45 mi
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vins futur 2

c’est dans le FIGARO du 15 Juin 2015

L’avenir du vin : les réflexions du futurologue Christian Gatard sur l’évolution du vin lors du prochain siècle (sciences, économie, société…)

un entretien avec Catherine Deydier et Stéphane Reynaud

Comment imaginer l’avenir de la consommation du vin ?

Dans un premier temps, je ne me placerai pas du point de vue de la viticulture mais de la socioculture. Et avant d’aborder ce que pourrait être demain le rôle du vin, regardons d’où il vient. Son pedigree mythologique est irréprochable. Le premier geste de Noé à la sortie de l’Arche est de planter une vigne comme symbole de liberté et de paix. Thot, dieu lunaire, offre à la déesse Hathor devenue lionne sauvage sa première coupe de vin et récite des formules magiques. Hathor se laisse amadouer et redevenue femme, elle devient la déesse de l’Amour et de la Joie. Le vin a symbolisé les quêtes initiatiques avec le graal des héros médiévaux. Fort de cette filiation le vin est aujourd’hui – sous l’angle culturel – un assemblage de discours sophistiqués, d’éruditions œnologiques, de gestuelles élégantes, de justifications médicales, de moments de partage… et d’ivresses exaltantes. Il a occupé l’espace spirituel du repas final du film Des Hommes et des Dieux. Il a toujours été un symbole de connaissance et d’initiation.

Le vin est un recivilisateur permanent. Les scènes de banquets à travers les âges, les musées et la littérature célèbrent son rôle de lubrifiant social.

Comment pourra-t-il conserver cette fonction de lubrifiant?

Le vin « culturel » est au cœur de la relation à l’autre. Il apporte à chaque moment un air de fête: il crée une relation très particulière souvent joyeuse et ludique avec une dimension de respect, de reconnaissance partagée et d’excitation. Voire d’action politique : la campagne de banquets au 19ème a débouché sur la révolution de 1848 et celle des banquets russes de 1904 a préparé la Révolution de 1905. Chaque époque se réinvente un rituel : la fête des voisins en est un exemple plus souriant. Les dîners en blanc font bouger les lignes à leur façon. Le vin anime l’art de la conversation et du vivre ensemble. Il permet de fluidifier la relation entre les gens. Il a peu de concurrence culturelle, car il est à la fois extraordinairement vivant et ancré dans l’histoire. Le vin devrait clairement se féminiser en même temps que les valeurs féminines vont sans doute s’imposer. La femme va reprendre à son compte la connaissance du vin, comme pour re-civiliser l’homme et faire du vin le centre d’une sorte de havre de paix autour duquel se retrouver. Les hommes intégreront toujours davantage le vin dans une stratégie de séduction, de sophistication, d’auto célébration: le vin va servir à «baisser la garde» d’une conquête potentielle tout en conférant à cette stratégie une élégance et du style. Les femmes, elles, vont avoir tendance à utiliser le vin pour gagner du temps et de la tendresse … avant de prendre une décision érotique. Le vin leur permettra de se sentir «plus sexy» et de «se mettre dans l’ambiance de la séduction» annoncée. Ainsi ira le monde…

Son imaginaire s’adossera donc toujours davantage à une profondeur immémoriale et une grande modernité ?

C’est une tendance lourde: apporter une bouteille de vin crée un espace sophistiqué d’intimité, de proximité, de cocooning. Cela donne le sentiment (voire la certitude) que si le monde va mal il y a toujours quelque part un lieu où l’optimisme personnel peut se trouver fortifié. Le cercle rapproché des convives, la symbolique de l’arrondi de la bouteille et des verres créent une bulle protectrice fantasmée. Le vin participe à un ralentissement du monde moderne, stressé, conflictuel, terrifiant. Il permet la réconciliation.

Ralentir, se réconcilier : deux notions résolument modernes, deux aspirations contemporaines.

Tout cela semble bien politiquement correct…

En apparence absolument ! mais nous nous y trompons pas… Et c’est peut-être là que réside la permanence du vin : sa double nature – ange et démon. C’est ce qui lui donne toutes les chances d’être pour longtemps dans notre paysage culturel. Il était, pour les anciens, le moyen d’abaissement de la conscience nécessaire à la révélation des secrets de la nature dont l’essence était symboliquement représentée par un accomplissement érotique et sacré – l’union de Dionysos et d’Ariane. Il permettait à l’initié des rites antiques de s’abandonner à sa nature animale pour en éprouver le pouvoir fécondant et la plénitude. C’est beaucoup moins politiquement correct. Si le vin est si important, c’est parce qu’il est le révélateur des secrets de la nature. Il fut le vin des initiés, celui qui procure une ivresse mystique.

Cette dimension est aujourd’hui revisitée, bien sûr, mais elle n’en est pas moins audacieuse. Fort de l’imaginaire qu’il véhicule, le vin a une formidable capacité d’être perçu comme un produit animé, éveillé, d’alerte. Et surtout, il est incertain comme le rappellent souvent les vignerons qui en bâtissent la légende. Et c’est dans cette incertitude que les hommes vont redécouvrir le frisson du vivant, se replonger dans leurs mythes fondateurs, assister aux retrouvailles de l’alchimie et de la matière exprimée dans la relation entre le cépage et la nature. Le vin devant être avant tout une expérience hédoniste. Nous devrions revenir à une nouvelle façon de boire et de manger, en privilégiant le « waouh effect », c’est à dire se besoin de ressentir les choses, de les palper avec le plus d’intensité possible. Sans doute faut-il s’attendre à une recherche de plus en plus poussée du plaisir et de la jouissance avec la volonté d’aller au bout de ses sensations. Le monde qui vient est à la recherche de sensations de plus en plus fortes.

On va s’orienter vers de nouvelles manières de boire le vin en groupe, afin de retrouver un rituel de connivence. Par exemple, dans des grandes coupes avec des pailles dans lesquelles tout le monde pourrait boire ensemble, ou encore via des Bag in Box que les designers pourraient transformer en fontaines de cristal. Il faut s’attendre aux prolongements de certaines tendances: les bars à vin vont ressembler au symposium romain, passe-temps aristocratique pratiqué couché sur les litières. Des expérimentations impertinentes vont être tentées, des grands crus seront proposés en tube dentifrice, des vins de couleurs étranges seront coupés d’eau de mer, d’épices. On va assister à une mise en spectacle du vin dans une relation orgasmique avec la matière, avec la nature : des dégustations secrètes et savantes, des formes d’insolence par rapport à l’approche respectueuse d’aujourd’hui. Bref une recherche de vertiges qui ne sera pas politiquement correcte du tout. Mais cela restera sans doute marginal quoique très médiatisé.

Le vin va rester aspirationnel ?

Oui sans doute de façon nouvelle. La mondialisation ne sera pas un nivellement culturel général, une sorte de grande soupe culturelle dont on ne reconnaitrait pas les grumeaux. Bien au contraire. Les revendications identitaires, la fierté d’une culture d’origine, le sentiment d’appartenance à une histoire territoriale personnelle et unique vont s’amplifier. La notion de communauté cessera d’être un gros mot menacé par le communautarisme. L’espoir, peut-être utopique mais excitant, de communautés pacifiées, vivant en bonne entente et bonne intelligence, est un puissant horizon d’attentes à travers le monde. Pour le moment le moins qu’on puisse dire c’est que cela se fait dans la douleur. Mais cela permet de revenir au rôle symbolique et central de la vigne elle-même et des terroirs. Si ces utopies – après tout possibles – se réalisent, le vin (ses territoires, ses cépages, ses flaveurs, ses typicités) participera de ces identités.

Il faut s’attendre à voir coexister trois systèmes, trois imaginaires : les vins historiques ancrés dans une éthique de tradition, de terroirs bien définies et revendiqués, un goût spécifique, une identité culturelle – c’est la logique actuelle des vignobles. Dans un monde chaotique qui parait pour beaucoup en perte de repères, c’est la victoire du respect des lois de la nature. Les vins de marque dont le discours est basé sur cet imaginaire de respect du dogme … et d’un folklore, ont leur place ici.

A côté on trouvera des vins « hors sol », hors histoire viti-vinicole, adossés à des représentations culturelles diverses, des phénomènes de mode. Des blockbusters en quelque sorte. Il s’agira de marques dont les cépages seront anecdotiques et les vignobles indifférents. Bien entendu à priori on peut aussi se demander si la qualité, l’expérience gustative, le plaisir seront au rendez-vous. C’est que la notion de plaisir strictement organoleptique se sera déplacée vers celle – devenue prioritaire – de l’empathie retrouvée dans des rites collectifs. La vie urbaine solitaire et angoissée pourra lors se dissoudre non pas tant dans l’alcool que dans l’ivresse d’être ensemble. Le vin sera un prétexte.

Enfin on trouvera des vins ludiques, produits par des « vignerons insoumis », impertinents et créatifs qui feront bouger les lignes et qui exploreront des territoires « viti-culturels » , qui seront reconnus comme artistes à part entière et qui créeront des chapelles, des tribus d’adeptes.

Mais il n’y a pas de vignobles partout…

Bien sûr. Mais la consommation du futur sera celle de la diversité et de l’expérimentation. Chacun pourra décider de choisir une origine, son terroir natal, et une destination, son territoire choisi. Quiconque s’intéressera au vin pourra d’ailleurs passer d’un système à l’autre en fonction de ses états d’âme, des moments de la journée, de ses envies.

Le vin va rester dans l’univers du luxe ?

Il participe de l’ascension sociale. C’est une dynamique culturelle. Sa vocation est d’être de plus en plus élitiste mais pas exclusive. A Shanghai par exemple, les écoles d’œnologie connaissent un très gros succès auprès des femmes. Pour elles, il s’agit aussi de se rapprocher de la civilisation occidentale qui va rester un modèle… mais revisité, adapté, apprivoisé. Le vin continue plus que jamais de diffuser une culture européenne que les classes moyennes à travers le monde veulent s’approprier. Ce n’est pas tant la culture européenne qui est en jeu qu’une forme d’humanisme serein et pacifié. A New York après le 11 septembre il participait d’un rituel de reconnexion avec soi et les autres. A Tokyo il est porteur d’une valeur de rupture avec le quotidien. A Londres le verre de vin marque une frontière radicale et attendue: la ligne de démarcation entre sa vie professionnelle et sa vie personnelle. Il y a un wine moment magique. A Paris il crée un lien avec une histoire authentique, une source de civilisation, une sensualité à la fois consolante et stimulante.

Bref, le vin va poursuivre sa vocation irénique : rétablir la paix, ce qui sera le luxe de demain.

Christian Gatard

Auteur de Nos 20 Prochaines Années, Le futur décrypté (2009) L’Archipel, Mythologies du futur (2014) L’Archipel, ainsi que d’une dizaine d’ouvrages (romans, essais, récits).  2015 aux éditions Kawa Rupture, vous avec disrupture (ouvrage collectif)

Directeur de la collection Géographie du Futur chez L’Archipel.

Fondateur de christiangatard&co, Conseil en Prospective, Institut d’études qualitatives internationales.

 



signature de RUPTURE VOUS AVEZ DISRUPTURE
22 Mai 2015, 21 h 08 mi
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C’était à Marseille, jeudi 21 mai, invité par Avencall avec des gens formidables!marseille



[AFTERWORK MARSEILLE] De l’agilité dans le parcours client
12 Mai 2015, 8 h 33 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

La prospective, instrument de navigation du présent. 

Le 21 mai 2015 au Sportbeach de Marseille

CONFERENCE, TABLE RONDE, RETOURS D’EXPERIENCES et SEANCE DE DEDICACE

Une nouvelle solution à intégrer au sein du centre de relation client et c’est la panique ! Il va falloir revoir l’organisation. Sans compter les problématiques techniques et métiers.
Et si c’était l’inverse ? Et s’il existait des solutions souples, évolutives, capables de s’adapter à l’organisation des centres de relation client ? Nul doute que l’expérience client serait améliorée !

Venez découvrir comment créer de la synergie entre les solutions, entre les pôles informatiques et métiers de l’entreprise mais aussi entre l’entreprise et ses fournisseurs. Des experts du domaine vous donneront les clés d’une stratégie de relation client réussie et vous apporteront un éclairage sur les technologies d’avenir comme le WebRTC avec des cas concrets.

S’inscrire

Inscription gratuite mais réservée aux professionnels et soumise à validation de l'organisateur. 
Nombre de places limité.

Agenda

  • 16h45 : Accueil
  • 17h15 : Ouverture « Imaginez la relation client de demain »

> Hervé Bourdon, Créateur et Président de @shake

  • 17h30 : « Quand la technologie permet de transformer l’expérience client », 5 pistes de travail directement opérationnelles !

> Manuel Jacquinet, Rédacteur en chef du magazine En contact et Créateur de Expérience Client | The French Forum @ECfrenchforum

  • 17h45 : Table ronde « De l’agilité dans le parcours client »

Animateur :Hervé Bourdon
Intervenants :
> Yves Morel, Co-fondateur et Président, Bazile Telecom
> Sonia Benouaret, Directrice de centre, Keolis Côte d’Azur
> Laurent Demange, Directeur associé et Expert centre d’appels, Avencall
Christian Gatard, Sociologue et Prospectiviste

http://www.avencall.com/afterwork-de-lagilite-dans-le-parcours-client-le-21-mai-2015-au-sportbeach-de-marseille/

Partenaires de l’événement

Snom – Magazine En-Contact – Shake your e-commerce – Expérience Client | The French Forum



Les objets connectés ont-ils une âme?
30 avril 2015, 18 h 42 mi
Filed under: Non classé

https://www.youtube.com/watch?v=JyhZOiMnytQ&feature=youtu.be

senat

Conférence au Sénat…. cliquez dans l’image ci-dessus



le 29 avril – café de la prospective
16 avril 2015, 7 h 27 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

christian11Café de la prospective

Philippe Durance m’a invité le 29 avril. Il est professeur au CNAM, président de l’Institut des Futurs Souhaitables, créateur du Café de la Prospective, lieu ouvert où praticiens et amateurs de prospective débattent autour d’un verre ou d’une tasse, sans exclusive, sans souci de réputation académique.

Voici le message qu’il diffuse sur les réseaux sociaux:

**************************************************************************

La prochaine rencontre du Café de la prospective se tiendra le mercredi 29 avril 2015. Nous recevrons Christian Gatard, prospectiviste de talent, sociologue et chercheur, essayiste et romancier, auteur de plusieurs ouvrages dont Mythologies du futur (2014) et Nos vingt prochaines années (2009). Il dirige la collection Géographie du futur aux éditions de L’Archipel, ainsi qu’un cabinet d’études de marché international qu’il a fondé.

Christian Gatard apporte à la prospective un esprit buissonnier, innovant, rusé. Il nous parlera de son parcours, de ses méthodes, et de ce qu’il nomme l’« allégeance rebelle » : considérant que les forces de l’histoire sont irrésistibles, et que les mythes anciens sont les scripts du futur, il pense que c’est dans la nature humaine de les contester, et que chaque homme (et chaque femme) est un artiste qui doit trouver son art.

**************************************************************************
Nous vous attendons au premier étage du Café de la mairie,
51 rue de Bretagne, à l’angle de la rue des Archives, dans le 3e arrondissement (Métro Arts et Métiers ou Temple) le mercredi 29 avril 2015 à 19h.

On s’y retrouve?

(illustration Amélie Carpentier)



EN QUÊTE DE MYTHANALYSE Hervé Fischer (sous la direction de) M@gm@ vol.12 n.3 Septembre-Décembre 2014
11 avril 2015, 13 h 59 mi
Filed under: Actualité et nouveautés
  • ÉDITORIAL

    Hervé Fischer

    Je suis heureux de présenter ce numéro spécial de la revue M@GM@ consacré à une importante quête de ce que pourrait être le champ de recherche et la théorie de la mythanalyse. Les auteurs réunis ici, suite de l’invitation que m’a faite Orazio Maria Valastro, témoignent de l’actualité et de la diversité des centres d’intérêt en mythanalyse. On voit bien que chacun, quant à la grille conceptuelle et à la méthodologie, y suit son propre chemin, car il n’en existe pas encore qui soit balisé et nous réunisse. Et il est fructueux aussi que chacun y aborde ses thèmes de prédilection.

  • lien vers le magazine

http://www.magma.analisiqualitativa.com/1203/index.fr.htm

  • MYTHANALYSES ET BASSINS SÉMANTIQUES

     

    Christian Gatard

    On peut considérer les mythes comme des récits que l’humanité se raconte pour affronter les temps difficiles. C’est Frazer dans le Rameau d’Or qui le formule ainsi. J’aime bien les ethnologues un peu démonétisés comme lui. C’est dans les vieilles poêles qu’on fait les meilleures omelettes. Et puis, il y a toujours eu des temps difficiles. Et tout le monde a toujours pensé que le futur serait difficile. On a donc toujours besoin de récits. Mais comment s’en servir ? C’est là qu’intervient l’automythanalyse considérée instrument de navigation sur le fleuve du devenir. Les travaux d’Hervé Fischer ont montré combien la mythanalyse est un outil essentiel du jardinage de l’inconscient, engin technique spécialisé dans les grands travaux de l’imaginaire. Je propose ici d’adapter l’engin à ma propre course vers les étoiles mais vous allez voir que cela va pouvoir vous servir à vous aussi, lecteur.



Rupture, vous avez disrupture?
8 avril 2015, 6 h 28 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

Contribution au livre collectif du THINK TANK LES MARDIS DU LUXEMBOURG

Ruptures, fractures, sutures

Pour Christian Gatard les ruptures contemporaines font écho à l’histoire du monde. Pas d’histoire humaine sans fractures suivies de sutures. C’est le rôle symbolique des carrefours et des artistes. Les carrefours raccommodent les territoires et les artistes fabriquent les mythes de réconciliation avec le vivant.

Bientôt en librairie.

Ce millénaire va vite, presque même trop vite, tout change sans arrêt. Les responsables : la révolution digitale, celle du Web 2.0 et des médias sociaux, celle de la consommation collaborative ; sans oublier le big data, les objets connectés. Hier le progrès était linéaire … ou du moins l’imaginions-nous comme tel. Mais clairement, ce n’était que le tout début d’une exponentielle et soudain, nous nous retrouvons au point d’inflexion de la courbe – les mathématiciens pardonneront une métaphore approximative, mais il est clair que notre société subit une poussée violente. Courbe, exponentielle, accélération : ces mots évoquent plutôt la continuité ; et pourtant, nous ressentons tous peu ou prou une singulière impression de rupture ! Rupture… ou pas : telle est la question que le « think tank » Les mardis du Luxembourg s’est posée lors de ses réunions du mardi. Cette question, le groupe de réflexion se l’est très librement posée ; il en débattu ; et chacun a apporté dans cet ouvrage, son point de vue, fruit de ses réflexions et des débats critiques. Trois visions se sont dégagées, optimiste ou pessimiste selon les auteurs : • Vision plutôt historique pour les uns, parce qu’il convient de remettre l’avenir en perspective avec le passé pour mieux l’appréhender • Vision expérientielle pour les autres, parce que la réflexion doit également s’enraciner dans le vécu. • Vision philosophique pour les derniers, parce qu’à un moment, il faut bien tirer des conclusions un peu plus définitives. Rupture … ou pas : finalement, ce sera à vous, cher lecteur, d’en juger

ruptures disuptures



EMPREINTES BORDEAUX AVEC KEDGE BUSINESS SCHOOL LE 20 MARS 2015
25 mars 2015, 18 h 44 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

MASTERCLASS PROSPECTIVE avec Thomas Froehlicher, Directeur Général,  Kedge Business School

une rencontre inspirante…

Thomas Froehlicher et Christian Gatard

et quelques instants plus tard

CG EMPREINTES



Le 25 mars 2015, à la Maison des Sciences de l’Homme Paris-Nord
20 mars 2015, 20 h 35 mi
Filed under: Non classé

Le 25 mars 2015, la Maison des Sciences de l’Homme Paris-Nord accueille la quatrième séance du séminaire ÉTHIQUES & MYTHES de la CRÉATION (EMC), sous la responsabilité de Sylvie Dallet.       Nouvelle adresse : 20 avenue Georges Sand, La Plaine Saint Denis. Salle 421. 14 heures

Thème de la séance : Prospectives et impensés de l’Innovation

Les petits pas de l’innovation collective : les danses complexes de l’éthique, de l’entreprise et de la formation. Penser la diversité dans l’innovation.

En la présence de : Christian Gatard (Agence Gatard & Associés, consultant prospective), Maria Giuseppina Bruna (enseignante-chercheuse, coordinatrice diversité École des Mines, consultante innovation), Monika Siejka (doctorante et consultante internationale web), Anne-Marie Petitjean (maitre de Conférences, U. Rouen, Écritures créatives, France).

Introduction Sylvie Dallet : « L’homo ludens contre le robot sapiens : le désordre créatif contre l’innovation ciblée… »

Christian Gatard  (sociologue, prospectiviste, auteur de Mythologies du Futur et de Nos 20 prochaines années, directeur de l’institut christiangatard &co) « Objets connectés avez-vous donc une âme qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ? ».    L’innovation de pointe retrouve (réinvente comme un trésor) des sagesses ou des folies antiques  et laisse envisager des cycles d’innovations/mutations au cœur desquelles objets et êtres humains construiront un partenariat, une réconciliation… peut-être.

Maria Giuseppina Bruna (Sociologie des organisations, consultante nationale et enseignante-chercheuse, coordinatrice diversité Ecole des Mines, spécialiste de l’éthique en entreprise) : « Faire confiance et pratiquer la diversité : un enjeu d’innovation managériale »

Cette communication-témoignage questionnera la mise en place d’une démarche de diversité (et de gestion de la diversité) à la manière d’un processus d’innovation destiné à investir une conception humaniste de l’entreprise. Dans ce cadre, j’interrogerai trois impensés de la pensée managériale de nature à impacter les dynamiques créatives : la conception de la diversité comme un arc-en-ciel des altérités, l’encastrement social de l’innovation (y compris organisationnelle), la conduite d’une démarche de diversité en entreprise comme démarche d’innovation managériale portée par des acteurs du changement, des missionnaires de la diversité.

Monika Siejka (doctorante chercheuse et consultante dans le numérique pour l’Enseignement Supérieur, fondatrice et ancienne directrice de l’Institut International du Multimédia) : Les réseaux sociaux comme le retour au récit de Shéhérazade. Les récits, tout comme ceux de la conteuse des Mille et Une Nuits se nourrissent aujourd’hui de l’interaction avec les réseaux sociaux. Sous de multiples formes et d’organisations, la Toile permet une recomposition des figures et des narrations qui fait écho aux appels des fans. L’exemple des séries télévisées, en pleine mutation narrative, est révélateur.

 

Anne-Marie Petitjean (Maitre de Conférences en Littérature, Université de Rouen) : « Le développement de l’imaginaire dans les pratiques de l’écriture créative »

L’université évolue dans ses pratiques créatives. Cette communication envisagera sur quelles représentations collectives de la créativité littéraire peut se fonder ce nouveau champ de recherche en atelier. Comment accompagnerl’émergence de l’armature critique d’une « écriture créative » universitaire ?  La question des liens entre éthique et esthétique rejoindra celle des progrès collectifs de l’imaginaire.

Maison des Sciences de l’Homme Paris Nord (20 boulevard Georges Sand, La Plaine St Denis) (métro Front Populaire).



nouveau site de christiangatardandco en ligne
18 mars 2015, 19 h 17 mi
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LogoCG&CO+Claim2



Intervention à Montréal du 22 au 25 avril mars dans le cadre de la rencontre internationale organisée par Hervé Fischer et Pierre Ouellet
17 mars 2015, 8 h 37 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

L’affiche

Affiche+Colloque+Avril



Interventions, performances, conférences de Christian Gatard
1 mars 2015, 9 h 05 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

C’est sur mars et avril

mon intervention du 12 mars au Sénat sera bientôt en ligne…

« objets connectés avez-vous donc une âme? »
senat(session privée)

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« masterclass prospective « au Salon Empreintes le 20 mars à 14h15 à  Bordeaux

(session publique)

http://www.empreintes.com/fr/programme.htmlempreintes

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Intervention à la Maison des sciences de l’homme le 25 mars dans le séminaire de Sylvie Dallet

(session publique)

ethiques

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Intervention à Montréal du 22 au 25 avril mars dans le cadre de la rencontre internationale organisée par Hervé Fischer et Pierre Ouellet

 Puissances symboliques et fabulations mythiques dans les imaginaires sociaux

Mythanalyse et anthropoïétique

Rencontre internationale organisée par Hervé Fischer et Pierre Ouellet et soutenue par

La Chaire de recherche du Canada en esthétique et poétique

de l’Université du Québec à Montréal

Le groupe en recherche-création Puissance des signes (FQRSC)

Le CÉLAT (Centre interuniversitaire d’études en lettres, arts et traditions)

et l’Association internationale de mythanalyse

23 et 24 avril 2015

Maison Ludger-Duvernay, salon Jacques Viger

82, rue Sherbrooke Ouest, Montréal

(session publique)

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Invité du café prospective de Philippe Durance le 29 AVRIL

bordeaux

(session publique)



présence intergalactique
3 février 2015, 11 h 17 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

Intergalactique avec Julie et JAL avec Julie Chapelle et Julien Jal Pouget, les âmes sensibles et énergiques du Festival Intergalactiques de Lyon en préparation de 2015.



INTERGALACTIQUES 2015 rendez vous à l’automne
31 janvier 2015, 20 h 34 mi
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intergalactiques2015prenez date!

 



eloge de delphine volange
30 janvier 2015, 18 h 02 mi
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c’est là:

http://www.radiorectangle.be/fr/eloge-de-delphine-volange.html

 



delphine volange a renoué avec le ciel hier soir
30 janvier 2015, 7 h 07 mi
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DV JANVIER 2015



intervention au marketing day
14 janvier 2015, 22 h 03 mi
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Christian Gatard, Fondateur CHRISTIANGATARD&CO

Sociologue et prospectiviste, il est le fondateur de christiangatard&co, conseil en prospective et Gatard et Associés, Institut d’études internationales de marchés. Il a publié une dizaine de livres, romans, récits et essais dont Nos 20 prochaines années, le futur décrypté. Mythologies du Futur, son nouvel essai paru en juin 2014. Il dirige la collection « géographie du futur » aux éditions de l’Archipel. Il est traducteur d’ouvrages de psychanalyse. Il publie régulièrement des articles liés à l’innovation sociale et culturelle et intervient dans différentes écoles et institutions (EHESS, CELSA, Sciences PO…)

http://m.youtube.com/watch?index=6&list=UUR-Txt-f6xUNMo4jmfqeGjw&feature=share&v=VzaVpZFv9dk

MARKETING DAY 2015-01-14 23.05.42



voeux partagés
10 janvier 2015, 19 h 12 mi
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la spirale



TOGO
3 janvier 2015, 17 h 43 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

http://golfenews.info/?p=6586

Jeunesse togolaise : « Je suis impressionné par son énergie (…) », Christian Gatard

Sociologue de son état et rompu dans les études et recherches prospectives, Christian Gatard a participé à la 2e édition du forum des jeunes entrepreneurs à Lomé. Il a animé  l’atelier sur le leadership le dimanche 14 décembre 2014 à Togo 2000. Votre site l’a rencontré et il s’est prononcé sur le forum, la jeunesse togolaise et l’Afrique en général le 2 janvier 2015 depuis Paris. Bonne lecture.

Golfenews : Vous participez pour à  la 2e fois au Forum des jeunes entrepreneurs. Quels sont les ateliers que vous avez animés ?

Christian Gatard : J’ai animé l’atelier concernant le leadership.

Selon vous en tant que Sociologue, quels sont les qualités d’un leader africain en ce 21e siècle ?

Il doit être capable d’influencer, de motiver, et d’aider les autres pour contribuer à l’efficacité et au succès de son propre projet. Autrement dit il doit prendre la parole et être à l’écoute.  Il doit être créatif et perspicace. Il doit s’adapter à des situations complexes. Avoir le goût du risque et avoir confiance en lui-même. Aujourd’hui il doit prendre le meilleur des mondes – ce qu’il y a de mieux dans la  culture africaine et ce qu’il y a de mieux dans la pratique européenne. C’est un sacré challenge mais c’est ça qui fera de l’Afrique le grand continent du 21ème siècle.

Quel projet vous a séduit au cours de la 2e édition du forum ?

C’est l’ensemble de la démarche menée par Claude Grunitzky qui est passionnante et tient déjà ses promesses. L’enthousiasme, la créativité et la bienveillance de chacun – que ce soit les jeunes entrepreneurs, les futurs entrepreneurs ou les animateurs des ateliers – tout cela est passionnant et prouve qu’on peut croire à une telle initiative.

Votre mot à l’endroit de la jeunesse togolaise

Je suis impressionné par son énergie, sa foi en l’avenir, sa capacité à être créative avec des moyens souvent minimes et quand elle a plus de moyens à réussir à les optimiser au mieux.



Parlons mythes
28 décembre 2014, 9 h 09 mi
Filed under: Actualité et nouveautés

 merci à Laurence Honnorat Innovaxiompour ses mises en lignes du 5 décembre 2014

Ethiques et Mythes

Sylvie Dallet, maîtresse de cérémonie


Sylvie Dallet
(cliquez dans les images)

 

Christian Gatard et ses instruments de navigation

Capture d'écran 2014-12-28 10.06.30

Hervé Fischer : construire le théorie mythanalytique

Hervé Fischer

 

Luc Dellisse : les mythes d’aujourd’hui

Luc Dellisse

Georges Lewi: les mythes et notre rapport au monde

Georges L.